La Cour de Cassation considère que les mesures prises par le gouvernement sont sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, et ne peuvent être, d’une part, imputable aux bailleurs, de sorte qu’il ne peut leur être reproché un manquement à leur obligation de délivrance, d’autre part, assimilées à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du code civil.
En l’espèce, s’agissant d’une résidence de tourisme, en raison des mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus covid-19, la locataire a, du 14 mars au 2 juin 2020, cessé son activité dans la résidence.
Le 26 mars 2020, elle a informé les bailleurs de sa décision d’interrompre le paiement du loyer et des charges à compter du 14 mars 2020.
Les bailleurs ont assigné la locataire en paiement d’une provision correspondant à l’arriéré locatif.
Le locataire a été condamné à payer les loyers.
Saisi d’un pourvoi, la Cour de Cassation rappelle que:
- l’article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, l’état d’urgence sanitaire a été déclaré sur l’ensemble du territoire national.
- qu’en application de l’article 3, I, 2°, du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 et du décret n° 2020-423 du 14 avril 2020 le complétant, jusqu’au 11 mai 2020, tout déplacement de personne hors de son domicile a été interdit à l’exception des déplacements pour effectuer des achats de fournitures nécessaires à l’activité professionnelle et des achats de première nécessité.
- qu’édictée pour limiter la propagation du virus par une restriction des rapports interpersonnels, l’interdiction de recevoir du public, sur la période du 17 mars au 10 mai 2020, prévue par les arrêtés des 14 et 16 mars 2020 du ministre des solidarités et de la santé, ainsi que par les décrets précités, résulte du caractère non indispensable à la vie de la Nation et à l’absence de première nécessité des biens ou des services fournis.
En conséquence, cette interdiction a été décidée, selon les catégories d’établissement recevant du public, aux seules fins de garantir la santé publique.
L’effet de cette mesure générale et temporaire, sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, ne peut être, d’une part, imputable aux bailleurs, de sorte qu’il ne peut leur être reproché un manquement à leur obligation de délivrance, d’autre part, assimilé à la perte de la chose, au sens de l’article 1722 du code civil.
En conséquence, ayant relevé que les restrictions résultant des mesures législatives et réglementaires prises dans le cadre de la crise sanitaire n’étaient pas imputables au bailleur et n’emportaient pas perte de la chose, la cour d’appel, saisie en référé d’une demande en paiement d’une provision, n’a pu qu’en déduire que l’obligation de payer le loyer n’était pas sérieusement contestable.
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 30 juin 2022, n°21-20.127 voir aussi 21-19.889 – n° 21-20.190