La sécurité juridique est ici remise en cause par la Cour de Cassation qui considère que tant que la levée d’option par le bénéficiaire de la promesse unilatérale n’a pas été réalisée ou est postérieure à la rétractation du promettant, cela exclue toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne peut donc pas être ordonnée.
En d’autres termes, un promettant pourrait se retirer à tout moment tant que la levée d’option ne serait faite par le bénéficiaire. Or, c’est à l’encontre même du principe et de l’esprit de l’acte de la promesse unilatérale de vente, dans laquelle le promettant s’engage fermement et définitivement de vendre, que va la Cour de Cassation.
Le 8 septembre 2010, la troisième chambre civile estimait que le décès du promettant n’empêchait pas le bénéficiaire de lever valablement l’option contre ses héritiers, leur auteur ayant « définitivement consenti à vendre » (Civ. 3e, 8 sept. 2010, D. 2011. 472; Defrénois, 2010. 2123, note Aynès).
La précision avait suscité l’espoir d’un abandon par la haute juridiction de la position, inaugurée en 1993, selon laquelle la rétractation d’une promesse unilatérale de vente ne peut être sanctionnée que par une condamnation à verser des dommages et intérêts, mais jamais par la réalisation forcée de la vente (Civ. 3e, 15 déc. 1993, D. 1994. 507; 28 oct. 2003, RDC 2004. 270, obs. Mazeaud).
L’arrêt rapporté brise en l’état ce courant jurisprudentiel.
En l’espèce, l’héritière du promettant, tenue par la promesse, l’avait rétractée avant l’expiration du délai d’option.
Les juges du fond avaient néanmoins prononcé la réalisation forcée de la vente en faveur du bénéficiaire qui avait levé l’option dans les temps, invoquant la force obligatoire du contrat.
Au visa des articles 1101 et 1134 du code civil, la Cour de cassation censure cette décision au motif que la levée d’option par le bénéficiaire de la promesse unilatérale postérieurement à la rétractation du promettant excluant toute rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir, la réalisation forcée de la vente ne pouvait être ordonnée.
Retour, donc, à la case départ. Pour la haute juridiction, le consentement du promettant semble devoir non seulement exister au jour de la conclusion de la promesse, mais également se maintenir pendant toute la durée de son exécution. C’est poser en matière de formation du contrat une condition de permanence de la volonté que le droit civil ignore.
Et là paraît désormais résider l’essentiel du problème. Il faut en effet remarquer que la motivation du présent arrêt se distingue en ce qu’elle abandonne toute référence à l' »obligation de faire » du promettant. En 1993, l’impossibilité d’exécuter en nature la promesse se déduisait, au moins formellement, de cette qualification d’obligation de faire, catégorie d’obligations dont on feignait un instant de croire que l’article 1142 interdisait par principe l’exécution. Ici, c’est en réalité toute idée de contrat de vente que la rétractation du promettant efface, comme en témoigne le visa de l’article 1101 du code civil (V. déjà, Civ. 3e, 25 mars 2009, D. 2010. Pan. 224, obs. Amrani-Mekki ; JCP 2009. 213, obs. Labarthe ; RDC 2009. 995, obs. Laithier). Si la réalisation forcée de la vente est impossible, c’est qu’aucun contrat n’est envisageable faute de consentement du promettant au jour de la levée d’option.
Relevons seulement que les parties qui voudraient conférer une valeur plus importante à un engagement dont l’intensité se situe désormais en deçà de l’offre de vente avec délai ont toujours la possibilité de convenir que la sanction de l’engagement du promettant sera la vente forcée (Civ. 3e, 27 mars 2008, JCP 2008. II. 10147, note Pillet ; RDC 2008. 734, obs. D. Mazeaud).
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 11 mai 2011 n° 10-12875
Document joint : Civ311mai2011-10-12.875.pdf