Tous les copreneurs solidaires sont tenus au paiement des loyers et des charges jusqu’à l’extinction du bail, quelle que soit leur situation personnelle. En l’absence de stipulation expresse visant les indemnités d’occupation, la solidarité ne peut s’appliquer qu’aux loyers et charges impayés à la date de résiliation du bail.
En l’espèce, l’un des deux colocataires avait donné congé et quitté les lieux, et, face à un impayé de loyers, l’organisme HLM entendait faire jouer la clause de solidarité ainsi libellée : « Il est expressément stipulé que les époux, quel que soit leur régime juridique, les personnes liées par un PACS, les colocataires sont tenus solidairement et indivisibles de l’exécution du présent contrat. Pour les colocataires, la solidarité demeurera après la délivrance d’un congé de l’un d’entre eux pendant une durée minimum de trois années à compter de la date de la réception de la lettre de congé. »
Pour réputer la clause non écrite à raison de son caractère discriminatoire et déséquilibré, la cour d’appel relève qu’elle pénalise les colocataires par rapport aux couples mariés ou pacsés, les premiers étant les seuls à encourir une sanction en cas de congé donné par l’un d’eux. Il s’ensuit, selon elle, un déséquilibre au profit du seul bailleur, celui-ci pouvant apprécier, sans limitation dans le temps, la durée pendant laquelle il pourra réclamer le règlement des sommes dues en vertu du bail au colocataire lui ayant donné congé.
C’est au visa de l’ancien article L. 132-1 du code de la consommation (auj., art. L. 212-1), relatif aux clauses abusives dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, que la haute cour censure le juge du fond.
Elle relève que, comme tout copreneur solidaire, le colocataire est tenu au paiement du loyer et des charges jusqu’à l’extinction du bail, soit pour une durée limitée (jugeant qu’en présence d’une clause de solidarité les deux colocataires restent tenus solidairement du paiement des loyers, même en cas de départ effectif de l’un d’eux à la suite d’un congé: Civ. 3e, 8 novembre 1995, n° 93-17.110; Civ. 3e,30 septembre 2008, n° 07-16957 ; Civ. 3e, 2 octobre 2012, n° 11-22812 ; Civ. 3e, 23 juin 2016, n°15-12453).
Pour mémoire, le nouvel article 8-1 de la loi du 6 juillet 1989 résultant de la loi ALUR a fixé un cadre légal à la colocation (toutefois non applicable au secteur HLM), prévoyant notamment que « la solidarité d’un des colocataires [prend] fin à la date d’effet du congé régulièrement délivré et lorsqu’un nouveau colocataire figure au bail. À défaut, [elle s’éteint] au plus tard à l’expiration d’un délai de six mois après la date d’effet du congé ».
Quant au grief d’imprécision de la clause (la solidarité concerne-t-elle les seuls loyers et charges ou s’applique-t-elle également aux indemnités d’occupation ?), il est balayé par le juge du droit au visa de l’ancien article 1202 du code civil (comp. désormais : art. 1310).
Classiquement, celui-ci précise qu’en l’absence de stipulation expresse visant les indemnités d’occupation la solidarité ne peut s’appliquer qu’aux loyers et charges impayés à la date de résiliation du bail (dans le même sens, Civ. 3e, 13 juin 2001, n° 99-18382 ; Civ. 3e, 5 mai 2004, n° 03-10201; Civ. 3e, 1er avr. 2009, n° 08-13508 ; Civ. 3e, 11 févr. 2016, n° 14-25948)
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 12 janvier 2017 n°16-10324