Un acte présenté comme une cession de fonds de commerce est frauduleux et s’analyse en une cession déguisée du droit au bail s’il apparaît qu’aucune clientèle n’a été cédée.
Contrairement à ce qu’ont retenu les premiers juges, la preuve de l’absence de cession de clientèle n’est pas apportée en l’espèce.
Certes l’acte portant cession du fonds ne précise pas les chiffres d’affaires réalisés dans les lieux au cours des trois derniers exercices.
Cependant, seul le cessionnaire et non le bailleur peut se prévaloir du non-respect de l’article L. 141-1 du Code de commerce.
L’absence de chiffre d’affaires mentionné dans l’acte n’établit pas, à lui seul que le fonds a été inexploité durant ces trois exercices, d’autant que l’acte fait référence à sa comptabilité produite pour l’exercice clos le 31 décembre 2012.
La société cédante justifie avoir exploité dans les lieux un restaurant de cuisine asiatique, en produisant sa liasse fiscale pour l’année 2012, diverses attestations et captures d’écran de sites internet, ainsi que celles de factures EDF montrant une consommation électrique.
La société cessionnaire, quant à elle, justifie avoir modifié son objet social et ses statuts pour exploiter le restaurant, avoir réalisé les formalités de mutation de la licence IV et elle justifie avoir dégagé un bénéfice dès le premier exercice, ce qui n’aurait pu se faire, pour une société sans notoriété dans le domaine de la restauration, si la clientèle avait disparu lors de la cession du fonds.
Le défaut d’appel du bailleur à l’acte de cession du fonds de commerce et le non respect de son droit de préemption contractuel ne sont pas des manquements suffisamment graves pour entraîner la résiliation du bail, d’autant qu’en raison de son objet social la bailleresse ne pouvait reprendre l’exploitation du fonds de commerce.
Il y a eu poursuite de l’exploitation d’un fonds de restauration dans les lieux pris à bail, pour lequel les loyers appelés sont régulièrement acquittés.
La demande de résiliation judiciaire du bail doit donc être rejetée.
Cour d’appel, Paris, Pôle 5, chambre 3, 13 Novembre 2019 n° 18/00789