Dès lors que la stipulation d’une indexation est réputée non écrite, elle est censée n’avoir jamais existé. Ainsi, la créance de restitution de l’indu doit être calculée sur la base du montant du loyer qui aurait été dû à défaut d’application d’une telle stipulation. De plus, le locataire peut demander le paiement des sommes indûment versées au cours de cinq ans précédant sa demande en justice.
1. Absence de prescription de l’action en déclaration de réputation non écrite d’une clause d’indexation
Selon l’article L. 145-15 du Code de commerce, sont réputées non écrites les clauses ayant pour effet de faire échec aux dispositions protectrices du bail commercial. En conséquence, une clause d’indexation irrégulière, notamment lorsqu’elle ne joue qu’à la hausse ou crée une distorsion entre la période de variation de l’indice et l’application du nouveau loyer, est réputée non écrite.
La jurisprudence constante de la Cour de cassation rappelle que l’action tendant à voir réputer non écrite une clause du bail commercial n’est soumise à aucun délai de prescription (Cass. 3e Civ., 19 nov. 2020, n° 19-20.405 ; Cass. 3e Civ., 16 nov. 2023, n° 22-14.091). Ainsi, le locataire peut, à tout moment, solliciter la suppression d’une clause illicite.
2. Prescription quinquennale de l’action en répétition de l’indu
Si la clause est réputée non écrite, les loyers acquittés sur son fondement doivent être restitués au locataire. Cependant, l’action en restitution des sommes indûment versées relève de la prescription quinquennale de droit commun (article 2224 du Code civil). Dès lors, le locataire ne peut demander la restitution que des sommes payées dans les cinq années précédant la saisine du juge (Cass. 3e Civ., 30 juin 2021, n° 19-23.038).
3. Rappel des faits
Dans le cadre d’un bail commercial, un locataire s’est vu notifier des commandements de payer ainsi qu’un congé sans offre de renouvellement ni indemnité d’éviction. En réponse, il a contesté la validité de la clause d’indexation du bail, demandant qu’elle soit réputée non écrite et sollicitant la restitution des sommes indûment versées.
La cour d’appel a fait droit à cette demande en déclarant la clause d’indexation irrégulière et en ordonnant le remboursement des trop-perçus.
Toutefois, elle a retenu comme base de calcul le loyer acquitté à la date du point de départ de la prescription quinquennale. Ce raisonnement a été censuré par la Cour de cassation, qui a rappelé que la créance de restitution devait être calculée sur la base du loyer qui aurait été dû en l’absence de la clause litigieuse.
4. Calcul du montant du loyer de référence
Rappelons que la reconnaissance du caractère non écrit d’une clause entraîne sa disparition rétroactive. Par conséquent, la créance de restitution doit être calculée sur la base du loyer qui aurait été dû en l’absence de la stipulation illicite.
La Cour de cassation a censuré les décisions ayant retenu comme base de calcul le loyer acquitté à la date du point de départ de la prescription quinquennale, car cela revient à maintenir partiellement une clause réputée inexistante (Civ. 3e, 4 juill. 2024, n° 23-13.285). Le trop-versé correspond donc à la différence entre le loyer effectivement payé et celui qui aurait été dû sans l’application de la clause litigieuse.
En d’autres termes, si la réputation non écrite n’est que partielle, alors l’indexation s’applique régulièrement depuis le début sur le loyer de référence.
5. Portée de la sanction selon l’indivisibilité de la clause
En cas de réputation non écrite partielle d’une clause d’indexation, seule la partie irrégulière est réputée non écrite. Dans ce cas, le loyer de référence est celui résultant de la partie valide de la clause.
En revanche, si la clause est totalement annulée, le loyer de référence demeure celui initialement fixé au bail sans indexation.
Conclusion
L’irrégularité d’une clause d’indexation entraîne son anéantissement rétroactif et la restitution des sommes versées indûment. Toutefois, la prescription quinquennale limite la restitution aux cinq dernières années, et le calcul du montant à restituer doit être effectué sur la base du loyer initial ou du loyer corrigé en fonction de la validité partielle de la clause.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 23 Janvier 2025 n° 23-18.643