Une cour d’appel ne saurait déclarer le défendeur à l’action occupant sans droit ni titre dès lors qu’elle n’a pas constaté que la notification du congé est intervenue six mois avant l’expiration du bail.
Avant tout, il est économiquement important de rappeler à nos lecteurs assidus qu’il convient de faire délivrer les congés par un huissier. En effet, les risques de la lettre recommandée ne méritent pas l’économie obtenu puisqu’au final cela coute plus cher de procéder à la rectification de l’erreur.
Par le présent arrêt, la haute juridiction précise en effet que le demandeur à l’action, en l’occurrence, le nouveau propriétaire, qui est dans l’impossibilité de produire l’accusé de réception du congé signé de la main du locataire, ne saurait valablement exciper d’un courrier postérieur par lequel celui-ci reconnaît avoir eu connaissance de la démarche du bailleur.
En l’occurrence, le preneur avait, dans une lettre adressée à son cocontractant d’alors près d’un mois après la notification alléguée, « accusé réception » du congé pour vendre.
Ainsi, l’acquéreur se retrouve à son corps défendant et alors qu’il a, selon toute vraisemblance, payé le prix du marché pour un logement vide, propriétaire d’un local occupé pour trois ans (par le jeu de la tacite reconduction prévu à l’article 10, alinéa 3, de la loi de 1989).
Il n’est certes pas démuni à l’égard du bailleur-vendeur négligent, mais s’il doit intenter une action à son encontre, il y a fort à parier que le locataire aura quitté les lieux (suite à la délivrance d’un congé-reprise qu’on imagine que le nouveau propriétaire, traumatisé, prendra soin de faire délivrer par huissier interposé !) depuis bien longtemps lorsqu’il obtiendra gain de cause.
En matière de délivrance par LRAR d’un congé, soyez convaincu qet il convient de le rappeler que la date de réception d’une notification faite par LRAR est celle qui est apposée par l’Administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire (article 669 du CPC, Civ. 3e, 14 déc. 1994, Bull. civ. III, n° 216 ; Administrer juin 1995. 25, note Canu ; JCP N 1995. II. 1047, note Djigo ; 10 janv. 1996, Bull. civ. III, n° 10 ; D. 1996. Somm. 369, obs. CRDP Nancy 2 ; AJPI 1997. 209 – 2e esp. – ; jugeant que la date à prendre en compte pour la délivrance d’un congé à l’autre partie au bail est celle de la remise de la lettre recommandée avec AR à son destinataire, V. Civ. 3e, 29 janv. 2002, Loyers et copr. 2002, n° 195, obs. Vial-Pedroletti ; dans la même affaire, V. aussi Civ. 3e, 2 févr. 2005, Bull. civ. III, n° 26 ; AJDI 2005. 463, note Rouquet ; V. encore, à propos d’un congé émanant du locataire, cassant l’arrêt ayant décidé que la date de notification du congé à prendre en considération est celle de l’expédition à l’égard de celui qui y procède, Civ. 3e, 7 janv. 1998, Bull. civ. III, n° 3 ; D. 1998. IR. 35 ; RDI 1998. 305, obs. Collart-Dutilleul ; stigmatisant les dangers de l’offre de nouvellement délivrée par lettre recommandée, V. également Beaugendre, AJDI 2003. 339).
Cour de Cassation 29 octobre 2008 n°04-14895