Un indivisaire qui exerce seul le droit de vote attaché au lot indivis peut recevoir trois délégations de vote. Le départ de deux copropriétaires au cours du vote n’empêche pas la comptabilisation de ces copropriétaires au nombre des présents.
Un groupe de copropriétaires opposants contestait une décision d’assemblée générale renouvelant le mandat du syndic et décidant de l’acquisition d’un local privatif. Le rejet de leur pourvoi formé contre l’arrêt les déboutant de leurs prétentions est l’occasion de quelques rappels.
Les copropriétaires opposants invoquaient premièrement le nombre excessif de mandats de vote – trois – dont disposait un copropriétaire indivis ayant voté en faveur de la décision litigieuse. Dans leur pourvoi, ils soutenaient que tout indivisaire est réputé être titulaire d’un mandat tacite de représentation, ce dont il résultait, en l’espèce, que le copropriétaire mis en cause avait, en réalité, reçu, non pas trois, mais quatre mandats de vote, ce qui constituait une violation de l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965. Les opposants affirmaient, d’autre part, qu’un copropriétaire ne peut recevoir trois mandats qu’à condition que le total de ses voix et de celles de ses mandants n’excède pas 5 % des voix du syndicat. L’argumentation est logiquement rejetée : la cour d’appel, qui avait relevé que l’indivisaire avait exercé seul, au nom de l’indivision, le droit de vote attaché au lot indivis, en a « exactement déduit qu’aucun indivisaire n’avait excédé la limite de trois mandats fixée par l’article 22 de la loi du 10 juillet 1965 et que le nombre de tantièmes représentés par chacun d’eux était indifférent« .
La solution est classique. À chaque lot correspond un droit de vote, et un seul. Par suite, l’indivisaire qui exerce seul le droit de vote attaché au lot indivis ne vote qu’une fois. Le contenu de ce vote procède soit d’un accord entre indivisaires (on peut très bien imaginer que l’ensemble des indivisaires présents arrête au cours de l’assemblée une position commune matérialisée par un vote unique), soit de l’exercice du pouvoir de représentation qui lui est conféré expressément ou tacitement.
Lorsqu’un tel mandat est conféré à l’indivisaire, il ne s’agit pas d’une délégation de vote que lui consentiraient les autres : il s’agit juste du pouvoir d’arrêter seul une position commune. Ceci interdit de considérer que chaque copropriétaire indivis dispose d’une voix propre.
Ainsi, il convient de rappeler que lorsque le droit de vote attaché au lot est exercé par l’un des indivisaires, les autres n’en disposent plus (Civ. 3e, 20 juill. 1994, Bull. civ. III, n° 157 ; D. 1996. Somm. 161, obs. Capoulade). Dès lors, un copropriétaire indivis qui exerce le droit de vote attaché au lot est, comme tout autre copropriétaire, susceptible de recevoir trois délégations de vote. À cet égard, le poids total des votes dont il dispose est indifférent : la règle des 5 % ne s’applique que lorsque le nombre des délégations reçues est supérieur à trois.
Changeant leur fusil d’épaule, les opposants dénonçaient le fait que les voix de deux copropriétaires ayant quitté la séance avant le vote de la résolution litigieuse aient pu être comptabilisées, la non-incidence de leur vote sur la majorité requise n’étant pas de nature à conférer à la décision attaquée un fondement légal. Cette critique sera rejetée comme la précédente : dès lors que le départ de ces deux copropriétaires n’avait pas été signalé au moment où il était intervenu, ceux-ci avaient pu, sans irrégularité, être comptabilisés au nombre des présents. Leur vote n’ayant aucune incidence sur l’adoption de la résolution litigieuse, celle-ci pouvait être considérée comme acceptée.
La solution appelle deux remarques. D’une part, l’article 17 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967 n’impose pas le recensement des voix « pour », le nombre de voix en faveur d’une résolution pouvant se calculer par simple différence entre le nombre total de voix de l’assemblée (moins celles des abstentionnistes, réputés ne pas prendre part au vote) et le nombre des voix des copropriétaires opposants ou défaillants (Civ. 3e, 11 mai 2000, Bull. civ. III, n° 104 ; D. 2000. IR. 169 ; AJDI 2001. 346). De plus, et c’est le second point, un copropriétaire qui n’a pas signalé son départ – et fait mentionner celui-ci dans le procès-verbal – est juridiquement présent (V. Bouyeure, D. 1997. Somm. 247).
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 1er juillet 2009 n°08-18109