Cette décision apporte trois enseignements: (1) dès lors qu’il fait visiter le bien et que la vente se réalise, l’agent immobilier a le droit de percevoir ses honoraires, (2) mais en ne transmettant pas l’offre initiale des acquéreurs qui était plus avantageuse, les mandants on perdu une chance de vendre à un meilleur prix qui doit être indemnisé, et (3) l’agent immobilier a le droit de percevoir une clause pénale pour ne pas avoir été prévenu de la vente.
1- LA visite du bien donne droit au versement des honoraires
Il résulte des dispositions l’article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 que lorsqu’un agent immobilier, bénéficiaire d’un mandat, fait visiter à une personne l’immeuble mis en vente et qu’ensuite le vendeur traite directement avec cette personne, l’opération est réputée effectivement conclue par l’entremise de cet agent, lequel a alors droit au paiement de la commission convenue, sauf à tenir compte du prix de vente réel de l’immeuble et des circonstances ou fautes de l’agent immobilier qui peuvent conduire à réduire voire supprimer cette rémunération.
En faisant visiter le bien pour lequel il détenait un mandat non exclusif de vente à des candidats acquéreurs qui ont ultérieurement signé un compromis de vente avec les vendeurs, l’agent immobilier a réalisé une intervention essentielle et a donc droit au paiement d’honoraires.
2- L’obligation de transmission de l’offre
L’article 77 du décret du 20 juillet 1972 prévoit que l’agent immobilier doit informer son mandant dans les huit jours de l’accomplissement du mandat par lettre recommandée avec accusé de réception ou par tout autre écrit remis contre récépissé ou émargement.
La transmission d’une offre constituant une modalité d’exécution du mandat, la preuve ne peut donc en être rapportée que conformément aux dispositions de l’article 77
En ne transmettant pas à ses mandants l’offre de ces candidats acquéreurs, inférieure de 20000 euros au prix net vendeur convenu, il a toutefois commis une faute justifiant une baisse de leur montant.
En effet, la vente des mandants étant intervenu à un prix inférieur à celle de l’offre non transmise.
Les vendeurs sont ainsi tenus de lui régler à ce titre la somme de 14500 euros et non celle de 29000 euros, qu’il réclamait.
Cependant, le défaut de communication aux vendeurs de la proposition d’acquisition caractérise un manquement fautif de l’agent immobilier qui a entraîné pour ses mandants une perte de chance de n’avoir pu vendre le bien à un prix plus avantageux.
Ils estiment que la base de leur préjudice consiste en la différence entre le prix net qu’ils auraient pu percevoir et la somme effectivement perçue (21223 euros). La perte de chance est évaluée par la cour à 80 % compte tenu des incertitudes liées à l’acceptation par les vendeurs du montant proposé et de la réalisation des conditions suspensives en cas de signature d’un compromis de vente.
Compte tenu de ces éléments, le montant du préjudice s’élève à 16978 euros, montant totalement absorbé par le montant des honoraires de l’agent immobilier représentant 29000 euros. La cour rejette en conséquence la demande indemnitaire des vendeurs.
3- L’obligation d’informer l’agent immobilier de la vente
Pour leur part, les vendeurs ont également commis une faute contractuelle puisqu’ils avaient l’obligation de prévenir l’agent immobilier de la réalisation de la vente.
Ce dernier est ainsi fondé à demander le paiement de la clause pénale prévue au contrat, dont la cour réduit toutefois le montant de 90 % en lui allouant un montant de 1450 euros.
Cour d’appel, Chambéry, Chambre civile, 1re section, 1 Juin 2021 n°19/00187