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Publié le 9 Juin 2024

Agent immobilier : Droit de préemption et honoraires de l’agent immobilier

Dans le cadre d’une vente, la commune qui préempte doit les honoraires de l’agent immobilier, peu importe si ce dernier est l’associé du vendeur.

Pour mémoire, la Cour de cassation (Cass. 3e civ., 26 sept. 2007, n° 06-17.337) considère que le principe de prise en charge par le titulaire du droit de préemption urbain des honoraires de l’agent immobilier, est possible sous une double condition :

  • que le montant de la commission et la partie qui en est tenue soient mentionnés dans l’engagement des parties ;
  • que ces indications soient reprises dans la déclaration d’intention d’aliéner.

Si ces conditions sont remplies, la rémunération est due quel que soit le support constatant l’engagement des parties (Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 1ère chambre, Section A, 6 mars 2018 n°16/10063).

Cour de cassation, 3e chambre civile, 12 Mai 2021 – n° 19-25.226

Lorsqu’il exerce son droit, le titulaire du droit de préemption, au profit duquel la vente a été effectivement conclue, est tenu de prendre en charge la rémunération de l’intermédiaire incombant à l’acquéreur pressenti, auquel il est substitué, dès lors que le montant de la commission et la partie qui en est tenue sont mentionnés dans l’engagement des parties et dans la déclaration d’intention d’aliéner

De plus, la commission est due même si la préemption intervient à un prix inférieur à celui fixé dans la convention des parties (Cour de Cassation, 1ère chambre Civile, 24 janvier 2006 n°02-18.746).

PAttention, cependant, en l’absence de ces indications, il ne peut être opposé au titulaire du droit de préemption une obligation de payer la commission, même s’il est établi sa connaissance de la clause relative à la rémunération, dès lors que la DIA ne contenait aucune indication sur ce point (Cour de cassation, Chambre civile 3, 10 Mars 1993 – n° 90-19.578).

Plus récemment, la Cour de Cassation rappelle que lorsqu’il exerce son droit, le titulaire du droit de préemption, au profit duquel la vente a été effectivement conclue, est tenu de prendre en charge la rémunération de l’intermédiaire incombant à l’acquéreur pressenti, auquel il est substitué, dès lors que le montant de la commission et la partie qui en est tenue sont mentionnés dans l’engagement des parties et dans la déclaration d’intention d’aliéner. (Cour de cassation, 3e chambre civile, 12 Mai 2021 n° 19-25.226)

En l’espèce, par acte notarié du 22 mai 2018, la SCI Bellevue a consenti à la société Fields and lands promotion une promesse unilatérale de vente valable jusqu’au 16 septembre 2019, portant sur une propriété au prix de 900 000 €.

L’acte stipulait une rémunération de 108 000 €, à payer par le bénéficiaire de la promesse à M. [K] [F], agent immobilier ayant négocié l’acte selon mandat conclu le 15 mars 2017 avec la SCI Bellevue.

Une déclaration d’intention d’aliéner, mentionnant un prix de 900 000 € avec commission de 108 000 € au profit de l’agent immobilier à la charge de l’acquéreur, a été adressée à la commune, titulaire d’un droit de préemption. Celle-ci l’a reçue le 25 mai 2018.

Par décision du 19 juillet 2018, la commune a exercé son droit de préemption au prix de 900 000 €.

Par courrier recommandé du 15 octobre 2018, M. [F] a mis en demeure la commune de lui payer sa commission.

Par acte du 19 février 2019, M. [F] assigné la commune d’Aix-en-Provence devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence afin d’obtenir sa condamnation à lui payer la somme de 108 000 € ainsi que des dommages-intérêts.

Par jugement rendu le 8 octobre 2020, assorti de l’exécution provisoire, le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence a, entre autres, condamné la commune d’Aix-En-Provence a réglé les honoraires de l’agent immobilier pour un montant de 108.000,00 €. La commune a interjeté appel de la décision.

La cour d’appel confirme la décision du Tribunal.

En effet, dès lors que la commune préemptrice se substitue purement et simplement à l’acquéreur choisi par le vendeur, la commission de l’ agent immobilier lui est donc bel et bien due.

Il suffit qu’elle ait été initialement prévue au contrat, et que la déclaration d’intention d’aliéner la mentionne.

Il est indifférent que l’acte à l’origine de la préemption soit une promesse unilatérale de vente et non un compromis, que l’arrêté de préemption ne se réfère pas à la commission, ou que l’acte de vente dise ne pas valoir approbation des frais d’agence par la collectivité.

La vente du bien immobilier a été régularisée par acte authentique du 17 octobre 2018, mais la commune a refusé de payer la commission de l’agent immobilier.

Aucune fraude n’a été organisée pour permettre à l’ agent immobilier de percevoir la commission. Le fait que l’ agent soit associé de l’acquéreur initial ne suffit pas à établir une collusion frauduleuse. L’interdiction faite au mandataire d’acheter un bien qu’il est chargé de vendre n’est pas applicable : à supposer que l’interposition de personnes soit suffisamment caractérisée par le statut d’associé minoritaire, la nullité relative qui en résulte ne peut être invoquée que par l’autre partie (le vendeur). Concernant le montant lui-même, il est certes élevé, mais a été librement fixé, et corrélé au prix de vente qui a baissé. Enfin, la réalisation de sa mission par l’ agent immobilier n’est pas discutable dès lors que la promesse de vente (dans laquelle le préempteur s’est substitué au bénéficiaire initial) consacre la reconnaissance de cette réalisation par les parties. La commune devra donc régler la commission, sans qu’il y ait lieu de la réduire.

Le seul retard du paiement des honoraires par la commune ne suffit pas à allouer des dommages et intérêts supplémentaires à l’ agent immobilier . Il faudrait établir un préjudice autonome.

Cour d’appel, Aix-en-Provence, Chambre 1-1, 14 Mai 2024 n° 20/10842

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