Lorsqu’un agent immobilier omet d’informer un acquéreur de désordres visibles et apparents, il engage sa responsabilité pour manquement à son devoir de conseil. En revanche, il n’est pas tenu de détecter des vices cachés relevant d’une expertise technique.
Fondement juridique
L’article 1382 du Code civil (désormais article 1240) prévoit que :
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
Dans le cadre d’une transaction immobilière, l’agent immobilier est tenu à une obligation d’information et de conseil à l’égard de l’acquéreur. Sa responsabilité peut être engagée s’il omet d’attirer l’attention de l’acheteur sur des désordres décelables lors d’une visite attentive.
Responsabilité de l’agent immobilier : quelles limites ?
L’agent immobilier n’est pas un professionnel du bâtiment. Il ne peut donc être tenu pour responsable de vices cachés nécessitant une expertise technique approfondie. En revanche, il lui incombe d’alerter l’acquéreur sur les désordres visibles qui auraient pu influencer sa décision d’achat ou la négociation du prix.
Un cas concret : omission d’informer sur l’état de la toiture
Les faits
Un acquéreur achète une maison pour 30 000 € par l’intermédiaire d’un agent immobilier. Après la vente, il constate plusieurs désordres :
- Fléchissement du plancher
- Effondrement d’un escalier en bois
- Présence d’une cheminée à foyer fermé au lieu d’un insert annoncé
- Absence de tubage de la cheminée
- État dégradé d’une poutre maîtresse
- Dégradation de la toiture et des solins
L’acquéreur engage la responsabilité de l’agent immobilier, estimant qu’il aurait dû l’informer de ces défauts avant la vente.
Décision de la cour
La cour rejette une partie des demandes indemnitaires, considérant que :
- L’état de l’escalier était manifestement visible par l’acheteur.
- L’absence de tubage de la cheminée et l’état de la poutre maîtresse n’étaient pas des désordres apparents pour un agent immobilier.
- La présence d’une cheminée à foyer fermé au lieu d’un insert ne causait pas de préjudice à l’acquéreur.
En revanche, la cour considère que l’état de la toiture et des solins était visible lors d’une visite attentive, notamment en raison de traces d’infiltration. En omettant d’en informer l’acquéreur, l’agent immobilier a manqué à son devoir de conseil.
Indemnisation de l’acquéreur
Ce manquement a causé une perte de chance de négocier une réduction du prix de vente. La cour évalue cette perte à 10 % du prix d’acquisition, soit une indemnisation de 1 175 € HT.
Par ailleurs, en l’absence d’évaluation de la toiture par le diagnostiqueur, l’agent immobilier ne peut pas se retourner contre ce dernier.
Conclusion : les obligations de l’agent immobilier
- Un agent immobilier doit signaler les désordres visibles susceptibles d’influencer l’acheteur.
- Il n’a pas à se substituer à un expert en bâtiment pour détecter des vices cachés.
- En cas de manquement à son devoir d’information, il peut être tenu responsable d’une perte de chance de négociation.
Cour d’appel, Angers, Chambre civile A, 13 Février 2024 n° 20/00446