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Publié le 11 Avr 2011

Audit du bail commercial en cas de cession de droit au bail ou du fonds de commerce

POINTS-CLÉS

Certaines clauses du bail commercial peuvent avoir des conséquences négatives pour l’avenir du fonds de commerce.

Elles doivent être prises en compte par le repreneur

Elles sont principalement relatives à la cession du bail, au loyer et à la répartition des charges et des travaux

La valeur du fonds de commerce ne dépend pas uniquement de la valeur de la clientèle.

Certaines clauses du bail commercial peuvent avoir des conséquences négatives pour l’avenir du fonds de commerce. Elles doivent donc être prises en compte par le repreneur s’il ne veut pas risquer de les découvrir a posteriori.

Elles sont principalement relatives à la cession du bail, au loyer et à la répartition des charges et des travaux.

I. LES CLAUSES AYANT UNE INCIDENCE DIRECTE SUR LA CESSION DU BAIL

Le repreneur devra chercher dans le bail commercial du cédant les clauses qui peuvent avoir une incidence sur la cession. Son attention devra notamment être attirée par les clauses suivantes.

A. – Clause interdisant la cession du bail en dehors de la vente du fonds de commerce

Cette clause est usuelle dans beaucoup de baux commerciaux. Elle peut être rédigée de plusieurs manières. À titre d’exemple, les tribunaux ont interprété comme interdisant la cession du bail en dehors du fonds, la clause suivante « vous ne pourrez céder votre droit au présent bail, en tout ou en partie, qu’à un successeur dans le commerce ». Par conséquent, le repreneur ne pourra légitimement acquérir le bail que dans le cadre d’une cession de fonds de commerce.

Face à cette clause, le locataire peut négocier avec le propriétaire une autorisation de céder le bail seul.

Cependant, il pourra céder son bail commercial, en dehors de son fonds de commerce et pour des activités qui ne sont pas mentionnées dans le contrat s’il fait valoir ses droits à la retraite ou à une pension d’invalidité et s’il répond à certaines conditions (C. com., art. L. 145-51). Ce dispositif bénéficie au commerçant, à l’artisan à l’associé unique d’une EURL et au gérant majoritaire depuis au moins deux ans d’une SARL.

B. – Clause concernant la ou les activités autorisées dans les locaux loués

L’activité envisagée par le repreneur du bail doit être mentionnée dans le contrat de bail. Cette mention peut être expresse ou implicite (bail « tous commerces »). À défaut, le locataire devra négocier avec le propriétaire pour obtenir de ce dernier une autorisation de déspécialisation du bail au profit de son repreneur. Cette déspécialisation est souvent monnayé par le bailleur.

la clause « tous commerces » a pour objet de permettre au locataire de déspécialiser son activité sans avoir à respecter le formalisme défini, pour la déspécialisation partielle, à l’article L. 145-47 du Code de commerce et à l’article L. 145-48 de ce même code pour la déspécialisation plénière.

Attention ! La clause « tous commerce »ne permet pas au locataire de céder le bail pour »tous commerce ». Le repreneur doit donc acquérir le fonds de commerce pour pouvoir bénéficier de la possibilité de déspécialiser librement.

Pour les baux commerciaux spécifiant une seule ou plusieurs activités, il est quelques fois difficile de trouver un repreneur. C’est pour cela que le législateur est intervenu pour permettre au locataire, commerçant, artisan, associé unique d’EURL ou gérant majoritaire depuis au moins deux ans, qui fait valoir ses droits à la retraite ou à une pension d’invalidité, de céder le bail commercial de son entreprise individuelle ou de sa société pour une activité qui n’est pas prévue dans son contrat.

Attention !

En cas de cession du SEUL bail dans la dernière période triennale, le repreneur qui va exercer une autre activité, ne pourra pas justifier de trois ans d’exploitation de son fonds de commerce pour obtenir le droit au renouvellement de son bail. Le repreneur doit alors s’assurer de la signature d’un nouveau bail de manière concomitante à la cession.

C. – Clause d’agrément de la personne du repreneur

Cette clause a pour objet de soumettre la cession du bail à l’agrément préalable de l’acquéreur par le propriétaire. Elle ne doit pas autoriser pour autant le propriétaire à refuser l’acquéreur sans raison valable.

Le bailleur doit donc motiver son refus. Les motifs justifiant un refus d’agrément peuvent être de plusieurs ordres :

* soit l’acquéreur n’achète pas le fonds de commerce malgré l’existence de la clause l’obligeant ;

* soit il achète le bail pour exercer une activité qui n’est pas prévu au bail ;

* soit l’acquéreur est un insolvable notoire.

Dans la plupart des cas, l’agrément permet au propriétaire de contrôler a priori la régularité de l’opération de cession du bail qui est envisagée. Si le bailleur refuse d’agréer le repreneur sans motif ou avec des motifs non valables, le cédant, peut obtenir en procédure de référé la levée du refus d’agrément. Il devra préalablement faire la preuve des arguments du propriétaire. Pour ce faire, il utilisera un huissier de justice qui délivrera au bailleur une sommation interpellative par laquelle l’officier de justice demandera au bailleur de justifier son refus d’agrément ou son refus de répondre. L’huissier rédigera alors un procès-verbal qui sera alors utilisé en justice.

D. – Clause imposant un formalisme particulier

Plusieurs types de clauses peuvent exister dans le bail. Par exemple, il peut être prévu que le preneur doit faire réaliser l’acte de cession du bail, en présence du propriétaire, devant un notaire déterminé.

À défaut de cette clause, la cession du bail peut être effectuée par un acte sous seing privé. Pour rendre l’acte opposable au bailleur, il faudra alors lui notifier la cession du bail ainsi que celle du dépôt de garantie par un acte d’huissier (C. civ., art. 1690).

E. – Clause de garantie solidaire

Il s’agit d’une clause par laquelle le locataire qui cède son bail commercial ou son fonds de commerce s’engage à se porter garant solidaire du repreneur, appelé cessionnaire, pour le paiement des loyers ou des charges, jusqu’au renouvellement du bail. Cette clause permet donc au propriétaire de se retourner contre le cédant en cas de défaillance du cessionnaire.

Elle constitue une « épée de Damoclès » sur la tête du cédant. Elle concerne aussi le cessionnaire dans la mesure où ce dernier peut être amené à céder ultérieurement le bail.

La clause peut être rédigée de manière assez large pour couvrir également l’éventuelle défaillance d’un sous acquéreur. L’acquéreur a donc tout intérêt à limiter sa garantie solidaire à la défaillance de son propre cessionnaire.

À défaut de disposition particulière dans le contrat, la clause de garantie solidaire court jusqu’à l’expiration du bail initial.

Lors de la prise du bail commercial, le locataire doit en conséquence veiller à la rédaction de cette clause et à la négocier pour la réduire si elle a une portée trop large.

A titre d’exemple, il a également tout intérêt à demander :

* à son propriétaire à ce que soit insérée dans le contrat de bail une clause par laquelle le bailleur s’engage à informer régulièrement le cédant de la situation locative de son cessionnaire ;

* à son successeur de lui présenter des garanties personnelles (caution bancaire, cautionnement d’un de ses proches, etc.) de manière à s’assurer de sa solvabilité par la suite.

Il peut également demander au propriétaire de limiter la garantie à un certain nombre de mois de loyers (par exemple 6 mois de loyers).

II. LES CLAUSES RELATIVES AU LOYER ET A LA REPARTITION DES CHARGES ET DES TRAVAUX

Ces clauses n’ont pas une incidence directe sur la cession du bail, mais elles en ont un impact économique direct et immédiat.

En effet, le preneur s’engage en signant un bail au regard d’une surface déterminée, du bonne état locatif des lieux et du montant d’un loyer.

Or, il convient toujours d’analyser les clauses d’indexation et de charges augmentatives du montant du loyer.

A. – La répartition des charges

Dans le contrat de bail commercial, les parties déterminent librement les charges qui incombent au locataire et celles qui reviennent aux bailleurs.

En l’absence de clause dans le bail commercial, il convient de se référer aux principes de droit commun.

A ce titre, sont en principe à la charge du locataire :

* les taxes dites locatives, c’est-à-dire celles de voirie, d’enlèvement des ordures ménagères, d’assainissement, d’égout et de police ;

* les dépenses de consommation, c’est-à-dire eau, gaz, électricité ;

* les taxes afférentes à son activité ;

* les charges nécessaires à l’exploitation de son commerce ;

* les honoraires de rédaction d’acte et les droits d’enregistrement ;

* si le local est situé dans une copropriété : la quote-part des charges relatives aux éléments d’équipements utilisés et aux services communs.

Sont en principe à la charge du propriétaire :

* l’impôt foncier ;

* l’assurance de l’immeuble ;

* les frais de gestion et les honoraires du syndic ;

* la taxe annuelle sur les bureaux en Île-de-France ;

* si le local est situé dans une copropriété : les charges de conservation et d’administration des parties communes proportionnellement aux tantièmes de copropriété attachés au lot.

Le propriétaire a, toutefois, la possibilité d’insérer une clause dans le bail lui permettant de récupérer l’ensemble de ces dernières charges sur le preneur. Il peut ainsi demander au locataire de lui rembourser l’impôt foncier.

Dans cette hypothèse, il doit savoir que ces charges, considérées comme exceptionnelles, constituent un supplément de loyer déguisé. Il doit donc en tenir compte au moment où il discute le loyer avec le propriétaire.

B. – Les travaux

Une distinction est traditionnellement faite entre :

– les travaux d’entretien de l’article 605 du Code civil qui sont à la charge du preneur ;

– et les gros travaux, concernant le clos et le couvert, de l’article 606 de ce même code qui sont à la charge du bailleur.

Cependant, il n’est pas interdit de mentionner dans un bail commercial que tous les travaux sont à la charge du preneur y compris les travaux de l’article 606 du Code civil. Cette clause peut avoir des conséquences financières graves pour le preneur qui peut être ainsi amené à prendre en charge les travaux pour réparer une fuite qui trouve sa source sur le toit.

L’article L. 111-7 du Code de la construction et de l’habitation prévoit notamment une mise aux normes des locaux commerciaux pour l’accessibilité des handicapés pour le 1er janvier 2015. La réglementation dispose que les travaux sont à la charge du propriétaire ou du gestionnaire de l’établissement recevant du public.

Les travaux sont à la charge du preneur dans deux cas :

* si une clause du bail commercial le prévoit expressément ;

* lorsqu’il est stipulé dans le contrat de bail que le preneur prend à sa charge les travaux imposés par l’autorité administrative.

À défaut de clause expresse ou d’une clause mettant à la charge du preneur les travaux rendus obligatoires par l’autorité administrative, la charge des travaux incombe au bailleur en vertu du principe énoncé à l’article 1719 du Code civil. Ce dernier doit en effet délivrer au preneur un local en conformité avec l’activité autorisée par le contrat de bail.

C. – La possibilité d’une révision du loyer à la baisse

Lors de la conclusion du bail, les parties fixent librement le montant du loyer. C’est le jeu de l’offre et de la demande. En pratique, les parties se référent aux prix du marché.

Ce loyer peut être fixé à un montant très élevé, si le preneur n’a pas négocié son montant avant de signer le bail. Il peut alors se poser la question de savoir si on peut réviser à la baisse le loyer.

Dans la législation sur les baux commerciaux, la valeur locative a un rôle important. Cette valeur accompagne le bail, non pas dès sa naissance mais dès la première révision du loyer et ensuite tout au long de sa vie.

Il n’y a pas de définition légale de la valeur locative Mais le Code de commerce énumère les critères qui permettent de la déterminer. Selon l’article L. 145-33 du Code de commerce, ils sont les suivants :

* les caractéristiques du local ;

* la destination des lieux ;

* les obligations respectives des parties ;

* les facteurs locaux de commercialité ;

* les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

La problématique est la suivante : est-il possible d’obtenir une baisse du loyer lors d’une future révision triennale du loyer dans la mesure où l’on prouve que la valeur locative est à la baisse ?

Depuis la loi MURCEF du 11 décembre 2001, le locataire ne peut obtenir une baisse du loyer qu’en prouvant une modification à la baisse des facteurs locaux de commercialité (C. com., art. R. 145-6).

Un autre cas de baisse du loyer est une évolution à la baisse de l’indice du coût de la construction (ICC) ou de l’indice des loyers commerciaux (ILC), si ce dernier s’applique par la volonté commune des parties au contrat.

Si la révision est fondée sur une clause d’échelle mobile (révision annuelle du loyer fondée sur la variation de l’ICC ou de l’ILC), le loyer pourra être fixé à la valeur locative suivant certaines conditions.

L’article L. 145-39 du Code de commerce prévoit qu’une révision judiciaire peut être demandée chaque fois que par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus du quart par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou judiciairement (d’où l’importance de ne jamais signer d’acte lors des révisions annuelles validant la révision du loyer). Le juge saisi pourra ainsi fixer le loyer à la valeur locative.

Cependant, la Cour de cassation a clairement admis que le propriétaire pouvait demander le bénéfice de la révision judiciaire même si la clause d’échelle mobile entraînait déjà une hausse du loyer supérieur à 25 % (Cass. 3e civ., 20 juill. 1994, n° 93-10.657 : JurisData n° 1994-001369).

III. LES AUTRES CLAUSES DU BAIL

Parmi les di
férentes clauses du bail, il convient d’examiner les points suivants : la désignation des lieux, la durée du bail et l’éventuel renouvellement du bail par tacite reconduction.

A. – La désignation des lieux

La désignation des lieux est souvent une source de conflits ou de litiges si la description du local est sommaire.

À titre d’exemple, les deux situations suivantes :

* Un restaurateur découvre a posteriori que sa cuisine a été construite sur une cour empiétant sur les parties communes d’un immeuble en copropriété. Le syndic peut alors demander la destruction de ce local.

* Un commerçant utilisait depuis plusieurs années deux caves alors que le bail ne mentionnait qu’une cave. Le propriétaire est donc en droit de demander la restitution de la cave excédentaire.

Si la description dans le bail est sommaire, il est préférable de décrire les locaux de manière relativement claire et précise. Il convient, par exemple, d’indiquer la situation et la composition des locaux loués et des dépendances (caves, greniers, etc.).

Si des annexes, comprises dans les parties communes de l’immeuble (exemples : passage, sanitaire commun, etc.), sont mises à la disposition du locataire, il est également souhaitable de le spécifier, afin d’éviter toute contestation ultérieure.

Il ne faut pas hésiter à se déplacer pour vérifier la concordance entre la description des locaux figurant au bail et la réalité du local.

B. – La durée du bail

En principe, celle-ci est égale à neuf ans. Il est néanmoins possible de conclure des baux dont la durée est supérieure à neuf ans. Cependant, la conclusion d’un bail pour une durée supérieure à neuf ans n’est pas recommandée parce que ce bail peut être déplafonné au moment du renouvellement à la demande du bailleur.

En ce qui concerne le bail de courte durée (pour une durée égale au plus à deux ans) et la convention d’occupation précaire, ils ne permettent pas de bénéficier de la propriété commerciale. Ils sont régis par des dispositions spécifiques (C. com., art. L. 145-5).

Le locataire a donc généralement intérêt à obtenir du propriétaire que la durée du bail soit fixée à neuf ans.

C. – Le bail renouvelé par tacite reconduction

Si aucune des parties ne prend l’initiative à l’arrivée du terme du bail (au bout de la neuvième année) il se poursuit par tacite reconduction pour une durée indéterminée. Dès lors chacune des parties peut y mettre fin à tout moment en respectant un préavis d’au moins 6 mois et en délivrant le congé pour la fin du trimestre civil.

Cependant, si la durée du bail initial vient à excéder douze ans du fait de la tacite reconduction, le locataire ne peut plus bénéficier du mécanisme du plafonnement (qui est généralement calculé sur la variation des indices du coût de la construction).

Le preneur a donc tout intérêt à demander rapidement le renouvellement en envoyant un acte d’huissier au bailleur si ce dernier ne lui a pas envoyé un congé avec une proposition de renouvellement dans les six mois qui précédent la fin du bail.

Document joint : AUDIT DU BAIL COMMERCIAL EN CAS DE VENTE DU BAIL OU CESSION DU FONDS DE COMMERCE.pdf

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