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Publié le 15 Sep 2024

Bail commercial : Conséquences du congé tardif et de la relocation des locaux

Report des effets du congé irrégulier et ses conséquences

Le congé du preneur à bail commercial est irrégulier, faute d’avoir été délivré au moins six mois avant l’expiration de la seconde période triennale. Les effets du congé sont reportés à la prochaine période triennale, les loyers et charges restent dus, même si un état des lieux a été établi et que les clés ont été récupérées par le bailleur. Quid si le bailleur reloue ?

Pour mémoire, il résulte de l’article L. 145-4 du Code de commerce que la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans, mais que le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, dans les formes et délais de l’article L. 145-9 du même code. Celui-ci dispose que, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du Code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement.

Cette règle est d’ordre public, et la sanction du départ irrégulier du locataire au cours de la période triennale consiste dans le paiement des loyers et charges jusqu’à la fin de la période.

Droits du bailleur et effet d’un nouveau bail

En l’absence de délivrance d’un congé régulier, la conclusion d’un nouveau bail commercial portant sur les locaux délaissés est sans effet sur le droit du bailleur à obtenir paiement des loyers dus au titre du premier bail (Civ. 3, 10 septembre 2020, n° 19-16.184).

De plus, la remise des clés et l’acceptation de celles-ci par le bailleur ne peuvent être considérées comme une preuve d’acquiescement. Le propriétaire, en reprenant les clés, ne fait que prendre acte du départ du locataire et reprendre possession de son bien (Cass. 3ème civ., 26 septembre 2001, n° 00-13.053).

Le fait pour le bailleur d’avoir établi un état des lieux de sortie et accepté la remise des clés ne constitue pas une renonciation à contester la régularité du congé, notamment si l’irrégularité a été dénoncée et que des négociations sur les conséquences financières de la résiliation irrégulière du bail commercial sont engagées.

Faute du preneur et maintien des obligations locatives

Dans ces conditions, le preneur ne peut obtenir la résiliation judiciaire du bail commercial pour manquement du bailleur à son obligation de délivrance, surtout s’il a lui-même commis une faute en délaissant les lieux en connaissance de l’irrégularité de son congé.

Les effets du congé irrégulier sont donc reportés à la prochaine échéance triennale. Par conséquent, le preneur demeure débiteur du loyer et des charges jusqu’à cette date.

Conséquences de la relocation des locaux par le bailleur

Si le bailleur reloue les locaux, une compensation peut s’opérer entre l’indemnité due au preneur pour l’impossibilité de jouir des locaux et les loyers que ce dernier doit verser.

Selon l’article 1719 du Code civil, le bailleur est tenu de délivrer au preneur la chose louée, et l’article 1217 du Code civil dispose que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté peut :

  • suspendre l’exécution de son obligation,
  • demander l’exécution forcée de l’obligation,
  • obtenir une réduction du prix,
  • provoquer la résolution du contrat,
  • ou demander des dommages et intérêts.

Ces sanctions peuvent se cumuler, et des dommages et intérêts peuvent s’y ajouter.

Relocation et manquement à l’obligation de délivrance

Le bailleur qui reloue les locaux se met dans l’impossibilité d’exécuter son obligation de faire jouir le preneur du bien loué (Civ. 3, 24 septembre 2020, n° 19-17.496). Ainsi, le preneur est en droit de solliciter une indemnité équivalente aux loyers et charges correspondant à la période du bail précaire consenti à un tiers.

Les créances réciproques doivent se compenser à concurrence de leur montant respectif.

Cour d’appel, Colmar, 17 juillet 2024, n° 23/00673

Le congé du preneur à bail commercial est irrégulier faute d’avoir été délivré au moins six mois avant l’expiration de la seconde période triennale. Les effets du congé sont reportés à la prochaine période triennale, les loyers et charges sont dus même si un état des lieux a été établi et les clés récupérées par le bailleur. Quid si le bailleur reloue ?

1- Sur le report des effets du congé et ses conséquences

Pour mémoire, il résulte de l’article L. 145-4 du code de commerce que la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans, mais que le preneur a la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale, dans les formes et délai de l’article L. 145-9 du même code qui dispose que, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux soumis au présent chapitre ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement.

Cette règle est d’ordre public et la sanction du départ irrégulier du locataire au cours de la période triennale consiste dans le paiement des loyers et des charges jusqu’à la fin de la période.

En l’absence de délivrance d’un congé régulier donné par la locataire, six mois à l’avance, la conclusion d’un nouveau bail portant sur les locaux délaissés est sans effet sur le droit du bailleur à obtenir paiement des loyers dus au titre du premier bail (Civ. 3, 10 septembre 2020, n°19-16.184).

De plus, la remise des clés et l’acceptation de celles-ci ne peuvent constituer la preuve d’un acquiescement du bailleur, puisqu’en reprenant les clés de l’immeuble loué, le propriétaire ne fait que prendre acte du départ de son locataire et reprendre le bien lui appartenant (Cass. 3ème civ., 26 septembre 2001, n° 00-13.053).

Le fait pour le bailleur d’avoir établi un état des lieux de sortie et accepté la remise des clés ne constitue par une renonciation de la part du bailleur à contester la régularité du congé.

Il en est d’autant plus ainsi que le bailleur avait dénoncé l’irrégularité du congé du preneur et que les parties ont engagé des négociations sur les conséquences financières de la résiliation irrégulière du bail.

Dans ces conditions, le preneur est mal fondé à réclamer la résiliation judiciaire du bail fondée sur un manquement du bailleur à son obligation de délivrance pour avoir consenti un bail précaire à un tiers.

En effet, la faute initiale incombe au preneur qui a délaissé les lieux en connaissance de l’irrégularité de son congé.

Les effets du congé irrégulier sont donc reportés à la prochaine échéance triennale, de sorte que le preneur est donc bien en principe débiteur du montant du loyer et des charges correspondants.

2- Sur les conséquences de la relocation des locaux

Dans le cadre d’un raisonnement qui lui appartient, la Cour d’appel considère que si le bailleur reloue les locaux, une compensation doit s’opérer entre l’indemnité due au titre de l’impossibilité de jouir à nouveau des locaux et les loyers que le locataire doit verser.

Selon elle, aux termes de l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière, de délivrer au preneur la chose louée.

L’article 1217 du code civil dispose que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;

– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;

– obtenir une réduction du prix ;

– provoquer la résolution du contrat ;

– demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

Le bailleur méconnaît son obligation de faire jouir le preneur du bien loué, en conférant à un tiers un bail sur tout ou partie de ce bien (Civ. 3, 24 septembre 2020, n°19-17.496).

Ainsi, en relouant le local le bailleur s’est mis dans l’impossibilité d’exécuter son obligation de faire, de sorte que le preneur est fondé à solliciter une indemnité équivalente aux loyers et charges correspondants à la période du bail précaire consenti à un tiers.

Les créances réciproques doivent, selon la Cour d’appel, se compenser à concurrence de leur montant respectif.

Cour d’appel, Colmar, 17 Juillet 2024 n° 23/00673

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