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Publié le 24 Sep 2017

Conditions de validité du congé pour démolition – reconstruction

Dans le cadre du statut des baux commerciaux, dès lors qu’au moment où le congé a été délivré, le bailleur savait qu’il n’exécuterait pas les travaux, le congé revêt un caractère frauduleux et est frappé de nullité.

Aux termes de l’article L. 145-18 du Code de commerce, le bailleur a le droit de refuser le renouvellement du bail pour construire ou reconstruire l’immeuble existant, à charge de payer au locataire évincé l’indemnité d’éviction prévue à l’article L. 145-14.

Cependant, le bailleur peut se soustraire au paiement de cette indemnité en offrant au locataire évincé un local correspondant à ses besoins et possibilités, situé à un emplacement équivalent.

Ce congé peut être signifié pour une période triennale ou en fin de bail commercial et implique une démolition totale de l’immeuble existant et non de simples travaux de transformation ou d’aménagement. Quant à la reconstruction, elle ne doit pas nécessairement être prévue à l’identique.

Si l’obtention préalable d’un permis de démolir et de construire n’est pas exigée avant la délivrance du congé, le bailleur doit néanmoins avoir l’intention de démolir et de construire ou reconstruire au moment où il notifie son droit de reprise. Cela peut poser un problème lorsque le bailleur a l’intention de revendre l’immeuble.

En l’espèce, le bailleur avait donné congé plus de 2 ans après l’obtention des permis de démolir et de construire, sans qu’il ait réalisé les travaux projetés. Un mois après la date d’effet du congé, alors que le preneur contestait la validité du congé, il avait revendu l’immeuble.

Le preneur avait interjeté appel du jugement qui l’avait débouté de sa demande de nullité du refus de renouvellement en prétendant que le bailleur n’avait jamais eu l’intention de démolir et de reconstruire et qu’il y avait collusion entre le bailleur et l’acquéreur.

La cour d’appel a alors recherché l’intention du bailleur qu’elle avait considéré très antérieure à la signification du congé compte tenu de la date des permis de démolir et de construire. Néanmoins, les travaux n’avaient jamais été réalisés et l’immeuble a été revendu postérieurement à la date d’effet du congé.

Or, il ressortait de l’acte de vente que les permis de démolir et de construire avaient été transférés au futur acquéreur bien avant la signification du congé, de sorte que le bailleur savait qu’il n’exécuterait pas les travaux au moment de la délivrance du congé.

Par ailleurs et surtout, il était mentionné dans l’acte de vente que les locaux étaient libres à la date de la vente à l’initiative du bailleur et que l’acquéreur n’était pas concerné par la procédure judiciaire de libération.

La cour a donc considéré que cette mention démontrait qu’il n’y avait aucune transmission du congé et que les travaux réalisés par l’acquéreur n’ont pu régulariser a posteriori le congé délivré qui était manifestement irrégulier puisqu’il était démontré que le bailleur, qui n’était plus titulaire des permis, ne pouvait avoir l’intention de reconstruire l’immeuble existant au moment de la délivrance du congé. Le congé était donc frauduleux et devait être déclaré nul.

Une jurisprudence antérieure rappelle que le bailleur n’est pas tenu d’effectuer personnellement la reconstruction et pourrait transmettre ultérieurement le bénéfice du congé à un acquéreur de l’immeuble (CA Paris, 3 mars 1992 : Loyers et copr. 1992, comm. 433).

La Cour de cassation a jugé qu’un congé était valable et que l’intention du bailleur de démolir l’immeuble pour le reconstruire était établie puisqu’avant la délivrance du congé, il avait signé un compromis de vente par lequel l’acquéreur déclarait destiner l’immeuble à la démolition aux fins de reconstruction d’un immeuble d’habitation et qu’il était justifié des demandes de permis de démolir et de construire et de la délivrance de ces permis, après notification du congé (Cass. 3e civ., 27 nov. 2012, n° 10-30.071).

Il a également déjà été admis que le bailleur puisse après avoir donné congé, faire effectuer les travaux par la SCI dont il est l’associé gérant sans que, pour autant, ce congé doive être considéré comme frauduleux (Cass. 3e civ., 14 sept. 2010, n° 09-15338).

Cour d’appel de Toulouse, Chambre 1, 22 mai 2017 n° 15/02550

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