La Cour de Cassation considère, que dans un centre commercial, d »‘une part, en cas de désordres, pour obtenir le paiement d’une indemnisation, le Preneur doit caractériser la faute du Bailleur en relation de cause à effet avec le préjudice à indemniser, et d’autre part, si le Bailleur ne respecte pas les horaires d’ouverture, il n’est pas possible d’appliquer le principe du « retournement » des pénalités stipulées au bail commercial.
En l’espèce, le 26 janvier 2012, la société civile immobilière (la SCI) a donné à bail commercial à la société locataire des locaux à usage de supermarché dépendant d’un centre commercial.
Une ordonnance du 10 juillet 2014 a désigné, en référé, un expert aux fins d’examen de divers désordres affectant le centre commercial.
Le 22 novembre 2016, la locataire a assigné la SCI en indemnisation de préjudices consécutifs aux manquements contractuels imputés à celle-ci.
Aux termes de l’article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Pour condamner la SCI au paiement d’une certaine somme au titre de la perte de chiffre d’affaires, l’arrêt retient que celle-ci correspond au préjudice réel subi par la locataire du fait du manquement du bailleur à ses obligations contractuelles.
En se déterminant ainsi, après avoir retenu, d’une part, que ni l’absence de commercialisation de la cellule d’entrée du centre commercial, ni le non-respect des horaires d’ouverture n’avaient entraîné de préjudice, d’autre part, que le défaut d’éclairage et d’entretien du site étaient constitutifs de manquements contractuels quand bien même ils ne pourraient être directement corrélés à une baisse d’activité chiffrable pour l’exploitant, la cour d’appel, qui n’a caractérisé aucune faute de la SCI en relation de cause à effet avec le préjudice indemnisé, n’a pas donné de base légale à sa décision.
Aux termes de l’article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.
Elles doivent être exécutées de bonne foi. Pour condamner la SCI à payer à la locataire des pénalités stipulées par le règlement intérieur du centre commercial au seul profit du bailleur, l’arrêt retient que le principe du « retournement » des pénalités stipulées au contrat a lieu de s’appliquer en ce qu’il découle de l’application du principe de bonne foi dans l’exécution des contrats.
En statuant ainsi, alors que si la règle selon laquelle les conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l’usage déloyal d’une prérogative contractuelle, elle ne l’autorise pas à modifier les droits et obligations légalement convenus entre les parties, la cour d’appel a violé le texte susvisé.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 20 Avril 2023 n°21-24.848