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Publié le 22 Mar 2020

COVID 19 – Report, Suspension du paiement des loyers ou RIEN ?

Après la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 annonçant un report ou un étalement des loyers, c’est une ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020 qui interdit l’application de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions qui a été prise. En d’autres termes, pas de report ou d’échelonnement mais l’absence d’application de sanctions.

I CE QUE DIT LA LOI DU 23 MARS 2020

Plus précisément, la loi du 23 mars 2020 autorisait le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de trois mois à compter de la publication de la loi, toute mesure, pouvant entrer en vigueur, si nécessaire, à compter du 12 mars 2020, et notamment :

« Permettant de reporter intégralement ou d’étaler le paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels et commerciaux et de renoncer aux pénalités financières et aux suspensions, interruptions ou réductions de fournitures susceptibles d’être appliquées en cas de non-paiement de ces factures, au bénéfice des microentreprises, au sens du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique, dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie ; »

En d’autres termes, le gouvernement pouvait faire bénéficier du report intégral ou de l’étalement du paiement des loyers les entreprises remplissant les conditions suivantes :

– d’une part, l’entreprise occupe moins de 10 personnes ;
– d’autre part, l’entreprise réalise un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas 2 millions d’euros ;
– et enfin, l’activité doit avoir été affectée par la propagation de l’épidémie.

Ainsi, juridiquement, étaient exclus toutes les entreprises ne rentrant pas dans ces conditions légales.

II CE QUE DIT L’ORDONNANCE n°2020-316 du 25 mars 2020

Cependant, l’ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020 n’a ni autorisé le report, la suspension ou encore l’échelonnement du paiement des loyers mais seulement a interdit l’application des sanctions contractuelles et ce en ces termes:

« Les personnes mentionnées à l’article 1er ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce.

Les dispositions ci-dessus s’appliquent aux loyers et charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 précitée. »

1- Qui est concerné: on ne sait toujours pas

En d’autres termes, sont concernés par l’ordonnance: les « personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 ».

La définition précise doit être apportée par un décret qui est toujours en attente de publication.

Les personnes qui poursuivent leur activité dans le cadre d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire peuvent également bénéficier de ces dispositions au vu de la communication d’une attestation de l’un des mandataires de justice désignés par le jugement qui a ouvert cette procédure.

2- Quel est le sort des loyers et des charges locatives ?

Aucun report ou échelonnement n’est prononcé. Seules les sanctions sont rendus inapplicables.

En raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives, les propriétaires bailleurs ne peuvent pas mettre en œuvre ou obtenir :

  • le paiement des pénalités financières ou intérêts de retard,
  • le paiement des dommages-intérêts, d’astreinte,
  • l’exécution de la clause résolutoire,
  • l’exécution de la clause pénale;
  • ou l’exécution de toute clause prévoyant une déchéance,
  • ou l’activation des garanties (garantie autonome à première demande ?) ou cautions.

La loi ne dit rien sur les mesures de recouvrement forcées: saisie conservatoire, saisie attribution. Apparemment, elles pourraient toujours être mises en œuvre.

3- Pendant combien de temps ces mesures sont applicables ?

Ces mesures sont applicables aux locaux professionnels et commerciaux dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.

Rappelons qu’à ce jour, l’état d’urgence sanitaire a été instauré jusqu’au 24 mai 2020.

LOI n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

Ordonnance n° 2020-316 du 25 mars 2020 relative au paiement des loyers, des factures d’eau, de gaz et d’électricité afférents aux locaux professionnels des entreprises dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie de covid-19

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