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Publié le 26 Nov 2016

DEKA vs H&M: Renouvellement d’un bail commercial et déséquilibre significatif : compétence matérielle du tribunal de grande instance

Dans un arrêt du 18 octobre 2016, la chambre commerciale tranche la question de la détermination de la juridiction matériellement compétente pour se prononcer sur un litige survenu lors du renouvellement d’un bail commercial lorsque le preneur invoque une tentative de soumission à un déséquilibre significatif.

En l’espèce, un bail commercial portant sur des locaux situés à Paris avait été consenti en 1998 par la société Deka au profit de la société H&M.

Le bailleur avait notifié au locataire une demande de renouvellement du bail et, en l’absence d’accord sur la fixation du loyer renouvelé, celui-ci a exercé son droit d’option.

Le preneur a alors assigné le bailleur devant le tribunal de commerce de Paris.

Ce dernier a invoqué une rupture fautive des négociations relatives au renouvellement du bail commercial et a reproché au bailleur une tentative de déséquilibre significatif.

Le tribunal de commerce s’est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Paris. Le preneur a contesté la compétence matérielle de cette juridiction et a porté l’instance devant la cour d’appel de Paris, puis devant la Cour de cassation.

Les litiges concernant la fixation du prix du bail renouvelé sont tranchés, quel que soit le montant, par le président du tribunal de grande instance (C. com., art. R. 145-23).

Par ailleurs, les articles R. 213-2 et R. 211-4 du code de l’organisation judiciaire donnent plus généralement compétence au tribunal de grande instance pour tous les litiges concernant le statut des baux commerciaux.

Dans son pourvoi, la société H&M invoquait les articles L. 721-3 du code de commerce et R. 211-4 du code de l’organisation judiciaire pour soutenir la compétence matérielle du tribunal de commerce.

En effet, selon le premier texte les tribunaux de commerce connaissent des différends relatifs aux engagements entre commerçants.

La société défenderesse faisait valoir que le différend concernait les négociations menées par les parties pour s’entendre notamment sur le montant du prix du loyer renouvelé et que ces négociations devaient être désolidarisées du contrat spécifique sur lequel elles portaient : le bail commercial.

Ce moyen aurait pu être entendu par les magistrats du second degré qui ont pourtant retenu que la faute du bailleur invoquée, ainsi que l’éventualité d’un déséquilibre significatif concernaient les pourparlers portant sur l’ensemble du renouvellement du bail commercial et non pas uniquement sur la fixation du loyer renouvelé. Ils ont ainsi considéré que la juridiction devait examiner « les conditions du refus de renouvellement ».

La chambre commerciale rejette le pourvoi du preneur et retient que le litige concerne l’examen des modalités d’exercice du droit d’option par le bailleur, droit conféré par l’article L. 145-57 du code de commerce.

Elle en conclut que la compétence revient au tribunal de grande instance.

Par ailleurs, et pour étayer leur solution, les magistrats relèvent que l’article L. 442-6-III du code de commerce dispose que l’action tendant à qualifier un déséquilibre significatif peut être introduite devant la juridiction commerciale, comme devant la juridiction civile.

Cette affaire est à suivre avec attention car l’exercice d’un droit et notamment celui du droit d’option du bailleur peut-il selon les circonstances caractériser un déséquilibre significatif, est une question de premier plan qui pourrait boulverser les rapports entre Bailleur et Preneur ? Attendons la réponse.

Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 18 octobre 2016, 14-27212

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