En l’absence de désordres d’isolation phonique rendant l’appartement impropre à sa destination, l’existence d’une non-conformité aux documents contractuels liant le vendeur à l’acquéreur concernant la qualité de l’isolation phonique, mais ne rendant pas l’appartement inhabitable, est inopposable aux intervenants à la construction de l’ouvrage litigieux. Le vendeur maître d’ouvrage n’est donc pas fondé à exercer des recours contre ces derniers au titre du préjudice lié aux cloisons.
Au regard de l’article 1792 du code civil, l’impropriété à destination ne saurait s’apprécier par rapport aux cloisons conformes aux normes en vigueur pour un logement de moindre qualité, lorsque le maître d’ouvrage s’était engagé à vendre un appartement présenté comme devant être d’exception. Il résulte, également, de l’article 1604 du code civil que la notion de conformité ou non-conformité est inhérente à l’obligation de délivrance.
Après livraison de leurs appartements, différents acquéreurs ont assigné le constructeur non réalisateur en réparation de leurs préjudices subis, du fait du défaut de conformité de l’isolation phonique de leurs cloisons. En effet, stipulée comme devant être de grande qualité, cette dernière s’avérait de moindre qualité.
La difficulté soulevée en l’espèce avait trait à la qualification de ces désordres affectant l’isolation phonique. Deux voies pouvaient être empruntées, éventuellement de façon cumulative. La première, celle de la non-conformité contractuelle, était évidente : la qualité des cloisons n’offrait pas le confort d’isolation phonique originellement convenu. En revanche, la détermination de la gravité de ce désordre était plus problématique et entraînait, en outre, la possibilité ou non, de fonder des recours contre les différents acteurs de la construction litigieuse.
La Cour de cassation, en l’absence de désordres rendant les appartements impropres à leur destination, c’est-à-dire faute de désordre revêtant un caractère décennal, a jugé non fondés les recours du vendeur contre les intervenants à la construction (en l’espèce, l’entrepreneur général, le bureau de contrôle) et les assureurs de dommages-ouvrage (du constructeur non réalisateur) et de garantie décennale (de l’entrepreneur et du maître d’oeuvre).
Les rapports contractuels liant le vendeur aux divers acquéreurs sont inopposables aux intervenants ayant édifié l’immeuble. Seule la nature décennale des désordres aurait pu permettre de contourner le principe de l’effet relatif des contrats qui s’applique ici. La non-conformité de l’isolation phonique étant, en l’espèce, exclusive de toute autre qualification, elle reste circonscrite logiquement aux contrats de vente. Le vendeur supporte seul la réparation des manquements aux stipulations de ces contrats.
Par ailleurs, en visant l’article 1792 du code civil, la Cour de cassation rappelle que le respect des normes en vigueur en matière d’isolation phonique ne saurait être déterminant de l’absence de caractère décennal des désordres d’isolation phonique. Il est acquis que les dispositions de l’article L. 111-11 du code de la construction et de l’habitation – soumettant les exigences minimales requises en matière d’isolation phonique à la garantie de parfait achèvement – ne sont pas exclusives de la mise en oeuvre de la garantie décennale (V. Cass., ass. plén., 27 oct. 2006, Bull. ass. plén., n° 12; Civ. 3e, 21 sept. 2011, n° 10-22.721, Bull. civ. III ; Civ. 3e, 16 sept. 2003, n° 02-15.031; 9 déc. 2003, n° 02-18.628, 26 oct. 2005, Bull. civ. III, n° 204).
L’impropriété à destination devait être appréciée, en l’espèce, au regard de la notice descriptive sommaire que le maître d’oeuvre devait fournir au maître d’ouvrage, d’autant que l’appartement devait être d’exception et que les normes évoquées dans le présent arrêt étaient relatives aux logements de moindre qualité. P
Dès l’instant où le confort acoustique a été contractualisé – et érigé en élément déterminant du consentement des acquéreurs – il pourrait permettre, en cas de manquement, de rejoindre le champ d’application de la garantie décennale, via l’impropriété à destination.
Cour de Cassation, 3ème Chambre civile, 10 octobre 2012 n° 10-28309 et 10-28.310