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Publié le 2 Fév 2013

Devoir de conseil même en l’absence de mandat

L’agent immobilier, même en l’absence de mandat, s’il décide de s’entremettre doit vérifier l’identité de l’acquéreur, s’assurer de sa solvabilité, de l’origine des fonds et de son lieu de résidence, car il engage sa responsabilité délitcuelle.

Cette décision de la Cour d’appel de Douai vient compléter celles rendues par d’autres Cours d’appel en matière de solvabilité du locataire (CA Bordeaux, 1ère Chambre Civile Section B, 6 sept. 2012, n° 11/02340 ; CA Bordeaux, 1ère Chambre Civile Section A, 6 sept. 2012, n° 11/00186) ou du réel statut de propriétaire (Cour d’appel de Versailles, Chambre 3, 20 Septembre 2012 N° 10/09334)

Dans le cadre de son obligation de moyens, il appartient à l’agent immobilier de se procurer des renseignements sur la situation financière du candidat acquéreur se proposant de financer l’acquisition à l’aide de deniers personnels, et sur la manière dont il entendait s’acquitter de la somme de 342 000 euros.

L’agent devait s’assurer de sa solvabilité au moins apparente et permettre à l’opération de se réaliser dans les conditions prévues à l’acte.

En outre, cette obligation se trouvait renforcée par le fait que le candidat était de nationalité étrangère et domicilié chez un tiers.

Elle l’était d’autant plus que l’acquéreur avait de plus signé le même jour une autre promesse synallagmatique de vente par l’intermédiaire de la même agence immobilière, également payable au comptant.

Le seul fait d’avoir pris la précaution de photocopier la carte d’identité de l’acquéreur est insuffisant.

Si l’insolvabilité de l’acquéreur n’est pas démontrée, pas davantage que sa solvabilité, l’agent ne s’est pas non plus assuré de l’implantation en France de l’acquéreur, de l’effectivité de sa résidence au domicile mentionné, de son adresse en Grèce, ni de la manière dont les fonds étrangers seraient versés en France.

L’agent rédacteur de l’acte n’a pas davantage prévu, comme il est d’usage, le versement par l’acquéreur dès la signature de l’acte, d’un acompte sur le prix. Or, cette exigence aurait permis de vérifier le sérieux de l’engagement de l’acquéreur ainsi que ses moyens de paiement et de garantir ainsi la vente.

Au final l’acquéreur n’a jamais réitéré la promesse. L’agent engage donc sa responsabilité délictuelle envers le vendeur, avec lequel aucun mandat n’a été conclu.

Le seul fait que l’agent ait fait état de difficultés à joindre l’acquéreur ne saurait l’exonérer de sa responsabilité.

L’agent a ainsi manqué à ses obligations professionnelles. Cette faute est en lien direct avec le préjudice subi par le vendeur, qui n’a pu se libérer de son engagement de vente qu’après le délai fixé dans l’acte pour la réitération, alors qu’il avait la certitude bien auparavant que le candidat acquéreur ne donnerait pas suite à la vente, celui-ci étant introuvable.

Toutefois, ayant pu conclure une vente, l’immobilisation du bien ne s’est trouvée prolongée que de trois semaines par rapport à la date du 8 juillet 2009, mais pour un prix inférieur de 7 000 euros. Si le vendeur a obtenu la condamnation du premier acquéreur, il ressort que celui-ci n’a pas d’adresse connue et est de nationalité grecque.

L’impossibilité de faire exécuter les condamnations prononcées à son encontre est donc démontrée. Si le préjudice ne saurait correspondre au total des sommes au paiement desquelles l’acquéreur défaillant a été condamnée, le préjudice consiste néanmoins en des frais liés à la carence de l’agent, à savoir des frais de sommation et de procès-verbal de carence, des honoraires d’avocat, des dépens.

Il subit également un préjudice moral résultant de l’ensemble des tracas supportés ainsi qu’un manque à gagner résultant de la nécessité d’insérer dans le second acte de vente une clause résolutoire nécessitée par l’existence d’une première vente non encore résolue. L’agent doit donc indemniser le vendeur à hauteur de 10 000 euros.

Cour d’appel de Douai, Chambre 1, section 1, 21 Janvier 2013, N° 28/2013, 12/00414

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