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Publié le 29 Juin 2023

Droit de préférence et local industriel

Le droit de préférence de l’article L 145-46-1 du Code de Commerce ne s’applique pas au locataire titulaire d’un bail commercial pour un local industriel de fabrication.

Pour mémoire, l’article L. 145-1 du code de commerce prévoit que le statut des baux commerciaux s’applique aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d’une entreprise du secteur des métiers et de l’artisanat immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce.

De plus,l’article L. 145-46-1 du même code, créé par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, dispose que lorsque le propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement, cette notification valant offre de vente au preneur.

Les locaux à usage industriel se trouvant donc exclus du champ d’application de ce texte, le pourvoi pose la question de leur définition.

Après avoir rappelé l’objectif des travaux parlementaires de la loi du 18 juin 2014 excluant les locaux industriels du champ d’application du droit susvisé .

La Cour de cassation souligne que Le Conseil d’Etat a quant à lui jugé que, (CE, 28 février 2007, n° 283441, CE, 13 juin 2016, n° 380490 et 1CE, 3 juillet 2015, n° 369851) du code général des impôts, ont un caractère industriel les entreprises exerçant une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant.

La Cour de Cassation retient cette définition et en conclut que doit être considéré comme à usage industriel tout local principalement affecté à l’exercice d’une activité qui concourt directement à la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers et pour laquelle le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant.

En l’espèce, le 2 janvier 1997, Mmes [G], [K] et [D] [C] (les consorts [C]), propriétaires indivises d’un ensemble immobilier, l’ont donné à bail commercial à la société TP Bat, aux droits de laquelle s’est trouvée la société SEAC (la locataire).

Par acte reçu le 31 août 2017 par M. [B] (le notaire), les consorts [C] ont, par l’intermédiaire de la société Ipsom, vendu les biens loués à la société Financière Perdis.

Invoquant une atteinte au droit de préférence dont elle bénéficiait, la locataire a, le 5 octobre 2017, assigné les consorts [C] et la société Financière Perdis en annulation de la vente et indemnisation de son préjudice.

La cour d’appel a constaté que la locataire n’invoquait aucun usage artisanal, que les locaux loués étaient notamment destinés à un usage de fabrication d’agglomérés et que l’extrait du registre du commerce et des sociétés de la locataire mentionnait les activités de « pré-fabrication de tous éléments de construction à base de terre cuite plancher murs et autres » ainsi que de « fabrication de hourdis, blocs et pavés béton».

Elle a retenu que l’activité de négoce également exercée sur le site, seul en litige, n’était qu’accessoire.

Dès lors, la Cour de Cassation confirme l’analyse de la Cour d’appel qui a pu en déduire que le local donné à bail n’était pas à usage commercial ou artisanal au sens de l’article L. 145-46-1 du code de commerce.

Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 29 juin 2023 n°22-16.034

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