Malgré une occupation illégale d’un terrain privé sans droit ni titre par des familles de la minorité Rom, la Cour d’appel d’Angers a octroyé un délai de six mois avant leur expulsion considérant que l’expulsion doit être accompagnée de mesures permettant de reloger ces familles et leur offrir des conditions de vie dignes, ainsi qu’un accès aux soins et à l’éducation pour les enfants qui doivent pouvoir être scolarisés.
En d’autres termes, l’occupation illégale d’un terrain permettrait donc de bénéficier de mesures d’accompagnements à la sortie.
En l’espèce, un parking municipal est occupé par des caravanes appartenant à plusieurs familles de la minorité Rom.
La mesure d’expulsion sollicitée par la commune est légale et conforme:
- à l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en ce que les occupants occupent illégalement une parcelle communale, et, en tant qu’occupants sans titre, ne peuvent prétendre avoir une espérance légitime d’y rester,
- ainsi qu’à l’article 3-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant en ce que l’intérêt supérieur de l’enfant exige que soient offerts aux enfants et adolescents des conditions de vie dignes incompatibles avec le maintien dans des campements de fortune, dépourvus d’eau, d’électricité et d’équipements sanitaires.
Toutefois, si l’expulsion de familles Rom d’un terrain privé qu’elles occupent sans droit ni titre et dans des conditions indignes poursuit un but légitime, c’est à la condition que cette expulsion soit doublée de mesures permettant de reloger ces familles et leur offrir des conditions de vie dignes, ainsi qu’un accès aux soins et à l’éducation pour les enfants qui doivent pouvoir être scolarisés.
Ainsi, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la proportionnalité d’une mesure d’expulsion jugée nécessaire comprend le contrôle des modalités de sa mise en oeuvre, ce qui conduit à valider le principe de l’expulsion et à examiner les délais susceptibles d’être octroyés aux occupants pour assurer l’équilibre entre les droits fondamentaux revendiqués par chacune des parties.
En l’espèce, les familles justifient de vaines démarches pour trouver un logement, la plus ancienne demande de logement social datant de mars 2017 et deux enfants sont scolarisées dans la commune.
La décision du premier juge sera infirmée en ce qu’elle a réduit à 15 jours le délai prévu à l’article L. 412-1 du Code des procédures civils d’exécution et dit n’y avoir lieu à application de l’article L. 412-6 du même code et un délai de 6 mois sera accordé afin que les occupants puissent quitter les lieux dans des conditions décentes, bénéficier de la continuité de la scolarisation et des soins, et être accompagnés par les autorités dans le cadre des dispositifs prévus.
Cour d’appel, Angers, Chambre civile A, 6 Juillet 2021 n° 19/00454