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Publié le 17 Oct 2009

Expulsion, vices de formes et octroi de délai

Le commandement de quitter les lieux ne répondant pas aux exigences de l’article 195 du décret du 31 juillet 1992 est atteint d’un vice de forme et le prononcé de sa nullité est subordonné à la preuve de l’existence d’un grief. La personne menacée d’expulsion qui, en dix-huit mois, n’a entrepris aucune démarche de relogement, ne saurait obtenir de délai de grâce.

Mme Y a fait grief à l’arrêt de la cour d’appel qu’elle a attaqué de l’avoir déclarée irrecevable à agir en nullité de la vente conclue le 15 septembre 1966 entre Mme Z, sa bailleresse initiale et Mme X, aux motifs que si l’article 911 du code civil prévoit la nullité d’une donation déguisée faite entre deux personnes dont l’une n’a pas la capacité de donner ou de recevoir, aucune disposition légale ne prévoit une telle nullité lorsqu’une telle donation est intervenue entre personnes capables, et que les occupants d’un bien immobilier, assignés en expulsion et en paiement d’une indemnité d’occupation, ont intérêt, en défense à opposer tout moyen qui tend à faire rejeter, comme non justifiée, la prétention de l’adversaire ; que dès lors, en retenant que les époux Y, assignés en expulsion du bien immobilier qu’ils occupaient étaient dépourvus d’intérêt à agir en nullité de l’acte de vente par lequel Mme X prétendait être propriétaire de l’immeuble litigieux, la cour d’appel a violé les articles 31 et 71 du Code de procédure civile.

Le pourvoi est rejeté.

Ayant constaté que seuls les héritiers de Mme Z auraient intérêt à agir en requalification de la vente et que Mme Y n’en faisait pas partie, la cour d’appel en a souverainement déduit l’absence d’intérêt à agir de Mme Y.

L’article 195 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures civiles d’exécution pour l’application de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d’exécution prévoit que : « Lorsque l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef, le commandement d’avoir à libérer les locaux contient, à peine de nullité, en plus des mentions prévues à l’article 194, la reproduction de l’article 62 de la loi du 9 juillet 1991 et celle des articles L. 613-1 à L. 613-5 du code de la construction et de l’habitation« .

Le commandement de quitter les lieux ne répondait pas en l’espèce aux exigences de forme prescrites par cet article 195. La sanction des formes des actes de procédure est une nullité pour vice de forme. Pour limiter la possibilité d’obtenir l’annulation d’un acte de procédure pour vice de forme, l’article 114 du code de procédure civile exige notamment l’existence d’un grief. Le preneur ne justifiait d’aucun grief, son action en annulation ne pouvait donc prospérer.

L’article L. 631-1, alinéa 1er, du code de la construction et de l’habitation prévoit que « le juge des référés ou le juge de l’exécution, selon le cas, du lieu de la situation de l’immeuble peut, par dérogation aux dispositions des articles 1244-1 à 1244-3 du code civil, accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel, dont l’expulsion aura été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales, sans que lesdits occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation ».

La cour d’appel va motiver ainsi son refus de faire droit à un délai sur le fondement du texte précité : « [Le preneur] n’ignore pas que depuis le 10 juin 2006 il doit libérer le logement ; qu’il ne justifie néanmoins d’aucune tentative de relogement se considérant comme légitime à se maintenir dans les lieux depuis dix-huit mois « . La haute juridiction considère que la cour d’appel » a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision  » ; donc y compris si la personne intéressée soutenait par ailleurs que son relogement ne pourrait avoir lieu dans des conditions normales (puisqu’en l’espèce cela lui aurait fait perdre son commerce constituant sa seule source de revenus).

Cour de Casssation, 2ème Chambre Civile, 1er octobre 2009 n° 08-70137

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