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Publié le 15 Sep 2009

Indemnisation de l’état en cas de refus de concours de la force publique

La jurisprudence a toujours reconnu que la responsabilité de la puissance publique du fait de son refus de prêter le concours de la force publique en vue d’une expulsion ne peut être engagée qu’à l’égard du justiciable bénéficiaire de la décision. Or la décision rendue par le Conseil d’Etat va encore plus loin.

En effet, dorénavantla personne investie ultérieurement des droits de ce dernier peut également demander réparation à ce titre.

Par deux arrêts du 2 septembre 2009, le Conseil d’État a mis un terme à un raisonnement maintenu par les juridictions du fond en jugeant « que la responsabilité de l’État née du refus de prêter le concours de la force publique pour assurer l’exécution d’une décision de justice ne peut être engagée qu’à l’égard de la personne au profit de laquelle a été rendue cette décision ou de la personne investie ultérieurement de ses droits« .

Dans les deux espèces jugées, les requérants se voient, en application de ces principes, dénier tout droit à indemnisation.

Dans la première affaire, les sociétés SLIBAIL IMMOBILIER, NATIOCREDIBAIL et UNICOMI, avaient consenti à la société Morel et Barneron un contrat de crédit-bail en vue de l’acquisition par celle-ci d’un immeuble à usage industriel à Valréas. Ces sociétés sont devenues propriétaires de cet immeuble le 28 mars 1997 par l’effet de la résiliation de ce contrat.

A cette même date, la société Morel et Barneron a été mise en liquidation judiciaire et des employés de celle-ci, licenciés ou en cours de licenciement, ont commencé à occuper les locaux. Saisi le 17 juillet 1997 par le mandataire liquidateur de la société Morel et Barneron, le tribunal de grande instance de Carpentras a, par une ordonnance du 3 septembre 1997, ordonné l’expulsion des occupants. Le mandataire liquidateur a ensuite présenté au préfet de Vaucluse, le 23 octobre 1997, une demande de concours de la force publique pour l’exécution de cette ordonnance, que le préfet a rejetée.

Saisi le 27 décembre 2004 par les sociétés SLIBAIL IMMOBILIER, NATIOCREDIBAIL et UNICOMI d’une demande de versement d’une indemnité en réparation du préjudice qui aurait résulté pour elles du refus de concours de la force publique opposé au mandataire liquidateur de la société Morel et Barneron, le préfet de Vaucluse a rejeté cette demande ainsi que le Tribunal administratif jusqu’à ce que le Conseil d’Etat l’accorde.

Dans la deuxième affaire, la SCI Jules Verne, dont M. et Mme HUARD détenaient la totalité des parts, a acquis en 1991 un ensemble immobilier sis 4, rue Jules Verne à Saint-Ouen. Saisi par la SCP Brouard Daude, agissant en qualité de mandataire liquidateur de cette SCI, le tribunal de grande instance de Bobigny a, par une ordonnance du 21 juillet 2000, ordonné l’expulsion des occupants sans titre de cet ensemble immobilier. Le mandataire liquidateur a ensuite présenté au préfet de Seine-Saint-Denis, le 4 mai 2001, une demande de concours de la force publique pour l’exécution de cette ordonnance, que le préfet a rejetée.

Saisi par le mandataire liquidateur ainsi que par M. et Mme HUARD de demandes de versement d’indemnités en réparation du préjudice né du refus de concours de la force publique opposé au mandataire liquidateur, le préfet a rejeté ces demandes.

Le mandataire liquidateur de la SCI ainsi que M. et Mme HUARD ont ensuite saisi le tribunal administratif de Cergy-Pontoise de demandes tendant à la condamnation de l’Etat au versement de ces indemnités. Le mandataire liquidateur, après avoir accepté l’indemnité de 259 062,95 euros que lui proposait le préfet, s’est désisté de sa demande.

Or, par un jugement du 19 mai 2005, le tribunal administratif a, d’une part, donné acte de son désistement au mandataire liquidateur de la SCI et, d’autre part, rejeté la demande de M. et Mme HUARD. Le Conseil d’Etat a alors cassé la décision reconnaissant à M. et Mme HUARD le droit à indemnisation.

Conseil d’Etat, 2 septembre 2009, n°297126, Société Slibail Immobilier et autres

Conseil d’Etat, 2 septembre 2009, n°299478, M. et Mme HUARD

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