Un bailleur ayant délivré congé avec offre de renouvellement est recevable à demander une expertise afin de déterminer le montant de l’indemnité d’éviction, dès lors qu’il a exercé son droit d’option à la date à laquelle la cour statue.
L’article 145 du code de procédure civile, qui permet d’ordonner une mesure d’instruction avant tout procès, dès lors qu’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, connaît un certain succès en matière de baux commerciaux (jugeant qu’aucun texte relatif au bail commercial ne s’oppose à l’exercice par le juge des référés des pouvoirs que lui confère les dispositions de cet article, V. d’ailleurs Civ. 3e, 18 déc. 2002, Bull. civ. III, n° 271).
La Cour de Cassation cour a, en 2008, jugé que la demande d’expertise in futurum émanant du bailleur ayant délivré congé avec offre de renouvellement devait être rejetée, lorsque le demandeur n’a pas exercé son droit d’option (prévu à l’article L. 145-57 c. com.). En effet, il n’existe, en l’état, pas de litige potentiel, au sens de l’article 145 du code de procédure civile (Civ. 3e, 16 avr. 2008, n°07-15486).
L’arrêt rapporté permet de préciser la portée de cette solution.
Dans cette affaire, après avoir offert le renouvellement à son cocontractant, mais avant d’avoir exercé son droit d’option, le bailleur l’a assigné devant le juge des référés afin d’obtenir la désignation d’un expert missionné pour déterminer la valeur marchande du fonds de commerce.
Le preneur s’y est opposé, motif pris qu’à la date de la saisine du juge, aucun litige potentiel n’existait.
Cette opposition n’a pas prospéré devant les juges du fond (Aix-en-Provence, 13 nov. 2008), pour lesquels le bailleur justifiait bel et bien d’un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile, dès l’instant où, à la date à laquelle il a statué, il avait exercé son droit d’option.
Cette position est entérinée par la Cour de cassation qui, dans son arrêt de rejet, après avoir pris soin de préciser que l’existence d’un litige potentiel n’est pas une condition de recevabilité de la demande mais de son succès, estime que la déduction de la justification d’un motif légitime relevait du pouvoir souverain d’appréciation du juge aixois.
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 8 avril 2010 n° 09-10226