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Publié le 7 Juil 2009

Interversion de surfaces entre deux lots de copropriété : action en révision

En cas d’interversion de surfaces entre deux lots, le demandeur invoque non la méconnaissance des critères légaux de répartition des charges mais la surévaluation de celles-ci. Par suite, l’action engagée s’analyse en une action en révision.

En matière de contestation de la répartition des charges inscrite au règlement de copropriété, la qualification de l’action intentée est primordiale. En effet, alors que l’action en nullité dont il est question à l’article 43, in fine, de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 n’est soumise à aucune condition (de délai ou autre), l’action en révision, visée à l’article 12, se caractérise par un délai d’exercice limité (elle doit être introduite dans les cinq ans de la publication du règlement de copropriété au fichier immobilier ou dans les deux ans suivant la première mutation à titre onéreux du lot) et par une exigence quantitative (la répartition doit être lésionnaire de plus d’un quart).

Sur le fond, on évoquera la nullité de la clause lorsque le principe même de la répartition sera contraire aux dispositions d’ordre public de l’article 10 de la loi : il s’agit d’obtenir que soient réputées non écrites les stipulations d’un règlement de copropriété définissant les bases mêmes d’une répartition litigieuse (jugeant que cette action est ouverte, qu’il s’agisse de charges entraînées par les services collectifs et les éléments d’équipement commun ou de charges relatives à la conservation, à l’entretien et à l’administration des parties communes, V. Civ. 3e, 12 juin 1991, Bull. civ. III, n° 170 ; D. 1992. Somm. 135, obs. Giverdon ; 20 janv. 1993, Loyers et copr. 1993, n° 109).

Quant à l’action en révision, elle va intervenir lorsque sera en cause, non pas la légalité des critères retenus, mais le quantum appliqué (Civ. 3e, 27 nov. 1990, Bull. civ. III, n° 251 ; D. 1992. Somm. 134, obs. Bouyeure ; 12 janv. 2000, Administrer mars 2000. 34, note Capoulade).

Dans ce contexte, la nature de l’action à intenter en cas d’interversion de surfaces entre deux lots fait débat.

On mentionnera cette décision du 30 avril 2002 qui a tranché en faveur du caractère non écrit de la clause (Civ. 3e, 30 avr. 2002, AJDI 2002. 697, obs. crit. Giverdon), au terme d’une procédure riche en rebondissements, la même formation ayant, par un arrêt de cassation, jugé le contraire en 1998 (Civ. 3e, 30 juin 1998, Bull. civ. III, n° 141 ; RDI 1998. 684, obs. Capoulade ; AJDI 1998. 1071, note Guitard), et la cour de renvoi ayant, par la suite, refusé de s’incliner (en justifiant la nullité de la répartition des charges au regard des art. 5 et 10 de la loi de 1965 : Caen, ch. réun., 9 mai 2000, Loyers et copr. 2001, n° 128).

Par le présent arrêt de rejet, la haute cour revient donc sur sa jurisprudence de 2002 : en présence d’une interversion, il y a eu surévaluation de charges, mais non méconnaissance des critères légaux de la répartition des charges. Par voie de conséquence, seule l’action en révision est ouverte au demandeur.

On serait tenté d’approuver cette position puisque, conforme aux règles édictées par l’article 5 de la loi, la répartition ne pose problème qu’à raison de l’interversion constatée, laquelle ne constitue, selon l’expression de Claude Giverdon, qu’une simple « erreur matérielle » (V. ses obs. ss. Civ. 3e, 30 avr. 2002 préc.).

Il reste que l’action en révision n’est pas du tout adaptée à la rectification de ce type d’erreurs, notamment, au regard des conditions draconiennes de sa mise en œuvre, pouvant aboutir, comme au cas présent, à une solution qui sera ressentie comme profondément injuste.

Et l’on regrettera avec M. Giverdon que le statut de la copropriété ignore toute action en rectification d’une erreur matérielle de l’état de la répartition des charges (il ne s’agit pas ici d’adapter le règlement de copropriété au sens de l’art. 49 de la loi).

Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 17 juin 2009 n°08-16324

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