Le notaire doit alerter Tracfin dès que le contexte d’une vente immobilière éveille les soupçons.
Puor mémoire, en application de l’article L 561-10-2 du Code Monétaire et Financier, lorsqu’une vente immobilière est particulièrement complexe, porte sur un montant inhabituellement élevé ou ne paraît pas avoir de justification économique ou d’objet licite, le notaire, l’avocat ou l’agent immobilier doit se renseigner auprès de son client sur l’origine des fonds et leur destination ainsi que sur l’objet de l’opération et l’identité de la personne qui en bénéficie.
Si les explications ou les vérifications paraissent insuffisantes, une déclaration de soupçon doit être effectuée à Tracfin.
En l’espèce, une société vend la nue-propriété d’un bien immobilier au prix de 103 000 €. Une SCI, représentée par l’acquéreur de la nue-propriété, acquiert l’usufruit du même immeuble pendant 17 ans moyennant 737 000 €, payés dès la signature du compromis de vente et en quasi-totalité hors la comptabilité du notaire.
Il ressort des éléments du dossier que l’usufruit était sur-évalué, des modifications entre le compromis et l’acte de vente sont intervenus ainsi que le paiement d’une partie du prix hors la comptabilité de l’étude. Tous ces éléments auraient dû conduire un notaire à vérifier l’origine des fonds utilisés pour une vente ou prévenir Tracfin.
Or, le notaire rédige l’acte sans vérifier l’origine des fonds ni alerter Tracfin.
Il fait l’objet de poursuites disciplinaires, et est sanctionné pour ne pas avoir procédé à la déclaration de soupçon et ne pas avoir refusé de passer l’acte de vente.
La Cour de cassation confirme l’existence d’un manquement disciplinaire : l’opération présentait un caractère particulièrement complexe et les circonstances l’entourant ne permettaient pas d’exclure tout soupçon sur la provenance des sommes en cause.
Le notaire était tenu de vérifier l’origine des fonds et de procéder à une déclaration auprès de la cellule Tracfin.
En revanche, le notaire n’encourt pas de sanction pour avoir passé l’acte de vente, dès lors qu’il n’était pas prouvé que celle-ci présentait un caractère illicite ou frauduleux.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 22 mai 2019 n°18-12.101