Des acquéreurs de divers lots d’un immeuble en l’état futur d’achèvement en secteur protégé ont, après signature, sollicité l’annulation de leurs deux contrats (préliminaire de réservation et de vente) et l’indemnisation du préjudice subi.
En l’espèce, bien qu’ayant été démarchés à domicile, les acquéreurs n’avaient pas bénéficié des dispositions impératives consuméristes qui gouvernent la matière lors de la formation du contrat préliminaire de réservation, instaurant un délai de rétractation de quatorze jours (C. consom., anciens art. L. 121-21 s., devenus art. L. 221-18 s.). C’est au regard de ce manquement que l’acte était annulé.
La question posée à la Cour de cassation était de savoir si cette sanction devait à son tour entraîner la nullité du contrat de vente.
On ne peut plus clairement, les hauts magistrats ont jugé que, le contrat préliminaire de réservation étant facultatif, sa nullité est sans incidence sur la validité de l’acte de vente (v. déjà, en ce sens, CA Toulouse, 19 mai 2014, n° 13/02260 ; CA Angers, 5 nov. 2013, n° 12/01321 ; CA Montpellier, 16 mai 2013, n° 11/00891).
Le contrat préliminaire de réservation et le contrat de vente, s’ils s’inscrivent bien dans la même opération immobilière en pratique, n’en constituent pas pour autant un ensemble contractuel indissociable, comme tentaient de le soutenir les acquéreurs.
Le contrat de réservation, s’il est bien conclu en vue d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement (VEFA), n’en est pas moins indépendant, « autonome » (Angers, 5 nov. 2013, n° 12/01321).
D’une part, il est facultatif (CCH, art. L. 261-15, al. 1), d’autre part, il n’emporte pas, pour le réservant, obligation de vendre mais obligation de réservation en vue de proposer à la vente.
C’est ce qui distingue le contrat préliminaire de réservation de la promesse de vente.
Par ailleurs, en l’espèce, la renonciation au droit lors de la formation de la vente ne pouvait pas opérer, puisque le droit de rétractation consumériste n’était pas né : les dispositions n’avaient pas été mal appliquées, elles n’avaient, plus simplement, pas été appliquées.
On ne retrouve donc pas dans cette décision le raisonnement permettant de reconnaître que la signature de l’acte authentique sans réserve emporte renonciation tacite à se prévaloir de l’irrégularité de la notification d’un droit de rétractation (Civ. 3e, 7 avr. 2016, n° 15-13064, Civ. 3e, 8 juill. 2014, n° 13-19330).
Par cette solution, la Cour de cassation sécurise le contrat de vente en l’état futur d’achèvement.
Enfin, en l’espèce, l’action en nullité a été intentée plus de quatre ans après la signature de l’acte de vente, ce qui aurait été lourd de conséquences si la nullité avait été prononcée.
En l’occurrence, un autre obstacle propre au régime spécial de la vente en l’état futur d’achèvement protégeait de ce risque : la nullité du contrat de vente ne peut être invoquée par l’acquéreur qu’avant l’achèvement des travaux (CCH, art. L. 261-11, al. 6).
Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 27 avril 2017 n°16-15519