La clause d’un bail commercial faisant obligation au preneur d’adhérer à une association des commerçants et à maintenir son adhésion pendant la durée du bail est entachée d’une nullité absolue. Au nom de son droit à un recours effectif, le preneur ne peut, pour enrichissement sans cause, être condamné à verser des sommes équivalentes aux cotisations passées et futures.
Un preneur à bail commercial portant sur des locaux situés dans un centre commercial s’était vu imposer une clause d’adhésion à l’association des commerçants pendant toute la durée du bail. Il a porté l’affaire en justice pour obtenir, d’une part, l’annulation de la clause litigieuse et, d’autre part, le remboursement des cotisations versées.
Devant les juges du fond, toutes ses prétentions ont été favorablement accueillies, la clause étant annulée et le bailleur condamné, in solidum avec l’association, à lui rembourser les cotisations indûment perçues.
Sa victoire n’a toutefois duré que le temps de l’énoncé du début de la sentence, puisque, par ailleurs, les juges parisiens l’ont condamné à payer à l’association une somme équivalente au montant des cotisations (passées et futures) au titre de l’enrichissement sans cause, compte tenu des bénéfices qu’il a tirés et tirera des actions de publicité, de promotion et d’animation effectuées par cette structure.
Il s’en est suivi un double pourvoi : principal de sa part et incident émanant de l’association.
Liberté d’association
Au soutien de son pourvoi incident, l’association des commerçants faisait valoir que le preneur avait souscrit un engagement volontaire (sic), d’une durée déterminée (conformément à l’art. 4 de la loi du 1er juill. 1901), auquel il lui était loisible de mettre fin en mettant fin au bail via une cession consentie à un tiers ou en renonçant à en exiger le renouvellement (sic).
C’est sans surprise que les magistrats de la première chambre civile rejettent ses prétentions, estimant la clause en cause frappée de nullité absolue. En effet, nul n’est tenu d’adhérer à une association ou, y ayant adhéré, d’en demeurer membre (Ass. plén., 9 février 2001, Bull. civ. n° 3) idem lorsqu’il est imposé d’adhérer à une société ou à un GIE (Civ. 3e, 12 févr. 1997, Bull. civ. III, n° 33).
Droit à un recours effectif
Pour contester sa condamnation à verser au bailleur une somme équivalente au montant des cotisations au nom de l’enrichissement sans cause, le preneur s’est placé sur le terrain du droit européen, invoquant plusieurs dispositions de la Convention EDH, spécialement son article 13, aux termes duquel « toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale […] ».
Et il a été entendu par la Cour de cassation, qui censure le juge du fond pour avoir prononcé une décision aboutissant à une reconnaissance théorique, dénuée de toute effectivité, de la liberté du preneur de ne pas adhérer à l’association.
Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 20 mai 2010 n° 09-65045