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Publié le 26 Mar 2011

Mandat de vente non exclusif et le choix de l’agence pour réaliser la vente

Tout agent immobilier est un jour confronté à la situation relatée ci-après. En résumé, lorsque le mandant n’a pas signé de mandat exclusif, il a la faculté de conclure la vente par l’intermédiaire d’une autre agence que celle ayant fait visiter les lieux en premier.

En l’espèce, le propriétaire d’un immeuble avait signé un mandat de vente exclusif pour une durée de douze mois, avec une période d’irrévocabilité pendant les trois premiers mois (ainsi qu’il est dit à l’art. 78, al. 2, Décr. n° 72-678, 20 juill. 1972).

Par la suite, il devait notifier au professionnel de l’immobilier la résiliation de ce mandat, lui précisant qu’il souhaitait le remplacer par un mandat simple.

Quelques jours après, il signait un mandat simple avec une autre agence B, pour une durée initiale de neuf mois, renouvelable ensuite par tacite reconduction.

Par la suite, un compromis de vente était signé par l’intermédiaire de la première agence A.

L’acquéreur ayant, au préalable, visité le bien avec la seconde agence B, celle-ci entendait faire jouer la clause pénale prévue au mandat.

En réplique, l’agence A ayant conclu le compromis a tenté de faire valoir la nullité du mandat de vente conclu avec son confrère. Elle a, par ailleurs, argumenté afin de faire juger que ni elle ni le vendeur n’avaient commis de faute.

Sur la valeur de la clause pénale

Celle-ci précisait que « […] une indemnité forfaitaire et définitive d’un montant de 45 600 € sera du[e] par le mandant au mandataire […] en cas de conclusion de l’affaire, même après l’expiration du mandat, avec un acquéreur ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les locaux avec lui pendant la durée du mandat ».

Ce n’est pas tant sa rédaction que sa forme qui a entrainé la censure. En effet, cette clause a été réputée non-écrite par le juge aixois car, en contradiction avec les dispositions de l’article 78, alinéa 1er, in fine, du décret de 1972, elle n’était pas mentionnée en caractères très apparents, puisqu’écrite « avec les mêmes caractères et avec la même taille de police que le reste du texte, noyée ainsi parmi les autres conditions du contrat ».

D’après la Cour, la clause aurait du apparaitre en gras ou surligné. D’après nous, il conviendrait que la clause soit en majuscule en gras et surligné.

Sur la nullité du mandat signé avec la seconde agence immobilière

Afin de tenter d’obtenir la nullité du mandat conclu avec l’agence B ayant, la première, fait visiter les lieux, l’agence A a fait valoir que:

– le mandat n’était pas limité dans le temps;

– les règles applicables au formalisme du mandat n’étaient pas respectées;

– signé au domicile du vendeur, le mandat aurait dû respecter les prescriptions applicables au démarchage à domicile (C. consom., art. L. 121-21 s.).

Seule la question d’absence de limitation dans le temps du mandat retiendra l’attention, les deux autres causes de nullité n’étant pas fondées puisque, d’une part, les stipulations du mandat étant conformes aux dispositions des articles 6, § 1, alinéa 2, de la loi de 1970 et 73 du décret de 1972 et, d’autre part, la signature du contrat au domicile du vendeur n’était pas avérée.

Aux termes de l’article 7 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, le mandat qui ne comporte pas de limitation de ses effets dans le temps est nul (il s’agit d’une règle d’ordre public, Civ. 1re, 18 oct. 2005, Bull. civ. I, n° 363 ; Administrer janv. 2006. 54, obs. Bouyeure).

Pour autant, en l’espèce, la situation était différente, puisque seule la période de tacite reconduction était indéterminée.

Partant, dans la mesure où la visite du bien et la signature du compromis querellé avaient eu lieu au cours de la période initiale (de 9 mois), la nullité n’était pas encourue.

Sur l’absence de faute contractuelle du mandant

Si la faute contractuelle du mandant n’a pas été retenue, c’est qu’il n’a pu être prouvé qu’il avait eu connaissance de la première visite. En effet, le jour de la visite, seule la femme du vendeur était présente. Or, celle-ci est suédoise et ne s’exprime qu’en anglais.

Par ailleurs, il n’est pas établi que l’agence B ayant procédé à la visite en a ultérieurement averti son mandant (du moins, avant la signature du compromis de vente).

Qui plus est, l’acquéreur n’avait signé aucun bon de visite …

Sur l’absence de faute de l’agence ayant signé le compromis

L’arrêt rappelle, à cet égard, que, dans la mesure où le vendeur n’avait pas signé de mandat exclusif de vente, il avait la faculté de passer la vente par l’intermédiaire d’une autre agence, même si l’acheteur avait visité les lieux par l’entremise de la première

De plus, la vente a été signée pour un prix nettement inférieur à celui proposé par l’autre professionnel, lequel avait d’ailleurs dépassé le montant qui avait été fixé dans le mandat.

De plus, l’agence A par l’intermédiaire de qui le compromis a été signé n’a été alertée par son confrère de la visite en cause qu’après la signature.

Cour d’appel Aix-en-Provence, 1er mars 2011, RG n° 10/04241

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