Le bailleur qui a notifié à son locataire un congé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ne peut se prévaloir de la nullité de l’acte qu’il a lui-même délivré.
En dépit de la lettre de l’article L. 145-9 du code de commerce, qui impose le recours à un acte extrajudiciaire, le bailleur d’un terrain à usage commercial avait délivré à son cocontractant un congé sans offre de renouvellement par le biais d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Tout en ayant quitté les lieux, le preneur contestait la régularité de la procédure et s’estimait créancier d’une indemnité d’éviction.
En réplique, espérant échapper à l’indemnisation du commerçant, le bailleur a fait valoir que, compte tenu de l’erreur de forme commise, le congé était nul et le bail devait se poursuivre par « tacite reconduction ».
Cette position, qui consistait à prétendre qu’en quittant les lieux, le preneur avait volontairement mis fin au bail et, par là même, avait renoncé à être indemnisé, n’était pas tenable.
En effet, dans la situation décrite, le preneur avait le choix entre, d’une part, excipant de la nullité du congé, continuer à occuper les lieux (jugeant que le destinataire du congé adressé par lettre recommandée avec avis de réception, est en droit de se prévaloir de cette irrégularité et de poursuivre l’exécution du bail, V. Civ. 3e, 18 mai 1994, Bull. civ. III, n° 103) et, d’autre part, déménager tout en exigeant le versement de l’indemnité prévue à l’article L. 145-14 du code de commerce.
Et ce choix n’appartenait qu’à lui, seule partie que la loi et la jurisprudence entendent protéger. En effet, la nullité sanctionnant l’inobservation du mode de notification du congé est une nullité relative qui ne peut être invoquée que par le destinataire de ce congé (Civ. 3e, 20 déc. 1982, Bull. civ. III, n° 257 ;Civ. 3e, 18 mai 1994, Bull. civ. III, n° 103).
Tel est l’enseignement du présent arrêt.
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 15 septembre 2010 n°09-15192