Engage sa responsabilité délictuelle pour manquement à son obligation d’information, le notaire qui se contente d’une note de renseignement d’urbanisme sans s’informer sur l’existence d’un arrêté préfectoral publié relatif à un plan de prévention des risques d’inondation.
C’est sur l’étendue de l’obligation d’information et de conseil du notaire à propos du caractère inondable de la zone sur laquelle se situe l’immeuble vendu que renseigne cet arrêt de cassation rendu le 14 février 2018 par la première chambre civile.
En l’espèce, suivant acte reçu le 29 septembre 2005 par M. B…, notaire salarié de la société civile professionnelle YFY (le notaire), les consorts D… ont vendu à M. X… un immeuble à usage d’habitation.
Alléguant avoir découvert, en juillet 2011, que l’immeuble était, contrairement à ce qui lui avait été dit, situé en zone inondable, M. X… a assigné le notaire en responsabilité pour manquement à son devoir de conseil et d’information, et en indemnisation sur le fondement de l’article 1382 devenu 1240 du code civil.
La cour d’appel rejeta sa requête au motif que l’obligation du notaire avait correctement été accomplie par sa demande d’une note de renseignement d’urbanisme sur laquelle aucun élément ne laissait suspecter le caractère inondable de la zone, ni même l’existence d’un plan de prévention des risques d’inondation.
L’officier ministériel n’était alors pas tenu de vérifier l’existence d’un arrêté préfectoral qui le mentionnait même si celui-ci était régulièrement publié et pouvait de facto être consulté par l’acquéreur comme signalé par les vendeurs.
Par ailleurs, la cour affirme que le notaire n’avait pas à procéder à cette vérification sans y être incité par l’acheteur.
Pour les juges du fond, la seule demande d’une note de renseignement d’urbanisme suffit à l’accomplissement de l’obligation d’information quant aux risques d’inondation présents sur les lieux où se situe l’immeuble acheté.
Sur pourvoi de l’acheteur, la Cour de cassation fut amenée à s’interroger sur l’étendue de l’obligation du notaire : ce dernier a-t-il exécuté de façon entière et complète son obligation d’information en demandant et consultant la note de renseignement ou au contraire, aurait-il dû aller plus loin dans la recherche ?
La Cour régulatrice casse finalement l’arrêt pour violation de la loi et affirme de façon très claire que la note de renseignement demandée par le notaire ne le dispense pas de son obligation de s’informer sur l’existence d’un arrêté préfectorale publié concernant le plan de prévention des risques d’inondation.
Le notaire a non seulement l’obligation de demander une note de renseignement d’urbanisme mais également l’obligation de s’informer sur l’existence d’un arrêté préfectoral publié.
Que l’acquéreur puisse le consulter lui-même ou qu’il n’ait pas incité le notaire à procéder à sa recherche est indifférent.
En l’espèce, l’obligation du notaire n’a pas été entièrement exécutée. Il fallait, pour cela, qu’il se procure cette note de renseignement d’urbanisme mais qu’il s’assure également de l’absence de caractère inondable de la zone où se situe l’immeuble dont la vente lui avait été confiée.
Manifestement, cette simple note n’éclaire pas sur ce caractère puisqu’en la vérifiant, il n’a décelé, dans ce secteur, aucune trace d’inondation possible.
Cet arrêt se situe dans le droit fil d’une autre décision récente, qui concernait un tout autre domaine soumis lui aussi à l’obligation de renseignement du notaire, dans laquelle le juge opérait une distinction quant à la difficulté ou non de trouver l’information litigieuse.
Si cette information est facile d’accès pour le notaire, il doit la rechercher et la transmettre, dans le cas contraire, le juge est plus indulgent (Civ. 1re, 6 sept. 2017, n° 16-18.524) et ne le lui impose pas.
Le notaire fautif n’est tenu d’indemniser ses clients sur le fondement de l’article 1240 du code civil des seuls préjudices découlant directement de sa faute.
Dans le cas où aucun lien de causalité ne les relient entre eux, il n’est pas tenu de payer (Civ 1re, 5 avr. 2012, n° 11-10.321 ; 20 mars 2014, n° 13-12.287; 2 juill. 2014, n° 13-17.894 ).
Ici, la Cour de cassation considère que l’obligation n’est pas totalement accomplie.
Par conséquent, l’information donnée par le notaire – erronée parce qu’incomplète – constitue bien le fait générateur du dommage subi par l’acquéreur de l’immeuble situé dans une zone finalement inondable.
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 14 février 2018 n°16-27263