L’acquéreur d’un immeuble qui ne posséde aucune décision judiciaire contre la société civile de construction-vente qui a construit celui-ci, ne peut imméditament exercer de recours contre les associés, qui est alors considéré comme prématuré.
Une société a acquis, en l’état futur d’achèvement, d’une société civile de construction-vente (SCCV), un immeuble de bureaux.
Le contrat de vente en l’état futur d’achèvement (VEFA) contenait une garantie locative d’un an pour le cas où l’immeuble ne serait pas intégralement loué au jour de la livraison. À l’évidence, l’objectif n’a pas été atteint. De telle sorte que, après mise en demeure de la SCCV de lui payer certaines sommes en l’absence de locataire, l’acquéreur de l’immeuble a assigné les associés de celle-ci en paiement de sa créance. Le demandeur est débouté à tous les stades de la procédure.
En effet, concernant la SCCV, l’article L. 211-2 du code de la construction et de l’habitation dispose que « les associés sont tenus du passif social sur tous leurs biens à proportion de leurs droits sociaux« .
Toutefois, il ajoute que les créanciers sociaux » ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu’après mise en demeure adressée à la société et restée infructueuse « .
Pourtant, une mise en demeure infructueuse de la société ne suffit pas, contrairement à ce que la lettre du texte affirme. La jurisprudence ajoute à celle-ci une condition qui ne figure pas dans la loi : l’action contre les associés requiert un titre préalable contre la société (Civ. 3e, 2 déc. 1980, Bull. civ. III, n° 186).
D’après nous, et selon une partie de la doctrine, cette condition ajoute à la loi et rend encore plus complexe le recouvrement de créance et ne favorise pas une bonne administration de la justice.
Néanmoins, cette condition supplémentaire est confirmée par le présent arrêt qui juge que la poursuite, par l’acquéreur sans titre des associés de SCCV est prématurée.
Toutefois, la notion de titre est interprétée largement ; ainsi, l’ordonnance de référé condamnant la société à payer une somme d’argent est considéré comme tel (Civ. 3e, 17 févr. 1988, Bull. civ. III, n° 37). Il en est de même du jugement admettant à titre provisionnel la créance au passif de la société ayant fait l’objet d’une procédure collective (Civ. 3e, 24 oct. 1990, Bull. civ. III, n° 198). En revanche, nous apprend l’arrêt commenté, la qualification de titre est refusée au jugement de condamnation de la société, confirmé en appel. Un tel jugement ne vaut pas régularisation de l’action en paiement intentée irrégulièrement contre les associés.
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 3 novembre 2011 n° 10-23951