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Publié le 11 Déc 2013

Pas de minoration de valeur locative pour fixation contractuelle de pondération des surfaces

Une clause fixant contractuellement la pondération des locaux n’est pas une clause exorbitante imposant une obligation au locataire pouvant donner lieu à une minoration de la valeur locative en application de l’article R. 145-8 du Code de commerce.

Bien que le premier alinéa de l’article L. 145-33 du Code de commerce pose le principe que le loyer révisé ou renouvelé doit correspondre à la valeur locative en cas de fixation judiciaire, ce dernier est fortement atténué par le plafonnement institué par l’article L. 145-34.

Toutefois, si le bailleur peut se prévaloir d’un motif de déplafonnement ou si le locataire demande une fixation de son loyer à la baisse, l’article L. 145-33 s’applique de nouveau et la valeur locative s’appréciera alors suivant les éléments énumérés au 1° à 5° de cet article, ces derniers étant repris dans les articles R. 145-3 à R. 145-8 du Code de commerce.

Le premier alinéa de l’article R. 145-8 du Code de commerce dispose que « du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi et des usages« .

Cet article pourrait laisser penser que seuls les facteurs négatifs seraient susceptibles d’être pris en considération pour l’estimation de la valeur locative, mais dans la pratique, les experts, suivis par les juges, prennent également en considération les éléments pouvant valoriser le fonds de commerce.

En l’espèce, une société bailleresse avait donné des locaux à bail à une autre société, aux termes d’un acte qui mentionnait dans la clause relative à la désignation des lieux la surface pondérée avec un décompte détaillant le coefficient de pondération retenu pour chacun des locaux.

La bailleresse avait ensuite demandé la fixation du loyer à la valeur locative en réponse à la demande de renouvellement signifiée par la locataire.

Dans la mesure où le preneur soulevait que les méthodes de pondération avaient été modifiées au cours des dernières années, de sorte que la pondération retenue lors de la signature du bail n’était plus conforme aux usages actuels, la cour d’appel avait considéré qu’il s’agissait d’une clause exorbitante du droit commun devant donner lieu à une minoration de la valeur locative conformément à l’article R. 145-8 du Code de commerce.

Au soutien de son pourvoi, la société bailleresse soutenait que la clause d’un bail commercial destinée à fixer contractuellement les coefficients de pondération applicables aux surfaces louées ne fait naître à la charge du locataire aucune obligation ou aucune contrainte qui puisse justifier une minoration de la valeur locative.

Alors que la surface mentionnée dans un bail n’a pas de caractère intangible (CA Paris, 25 juin 1996 : Administrer févr. 1997, p. 28) et que le calcul de la surface pondérée dans une décision n’a pas d’autorité de la chose jugée quant à cette surface et permet au juge saisi d’une nouvelle demande de ne pas être lié par cette pondération (CA Paris, 19 nov. 2008 : Administrer févr. 2009, p. 44), la jurisprudence estime au contraire que la surface pondérée stipulée dans le bail s’impose aux parties puisqu’elle constitue une modalité de fixation du loyer en renouvellement (CA Paris, 2 févr. 1999 : Gaz. Pal. 1999, 2, p. 388).

Il était donc impossible de revenir sur le calcul de cette surface pondérée et de retenir la surface préconisée par l’expert.

Dans la mesure où économiquement, la pondération des surfaces est un outil permettant de comparer de manière objective des locaux de configuration différente, la cour d’appel a tenté de rétablir la situation en pratiquant un abattement permettant de revenir au montant de la valeur locative tel qu’il aurait été avec une pondération conforme aux derniers usages.

Appliquant à la lettre l’article R. 145-8 du Code de commerce qui ne vise que les restrictions à la jouissance ou les obligations imposées au preneur, la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel de Rennes et rappelle qu’une clause fixant contractuellement la pondération des locaux n’est pas une clause exorbitante imposant une obligation au locataire pouvant donner lieu à une minoration de la valeur locative.

Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 9 avril 2013, n° 12-15002

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