La Cour de cassation prend position sur la validité des prêts consentis pour des opérations frauduleuses de défiscalisation.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a rendu ce jeudi 7 juin 2012, cinq arrêts d’une importance particulière car ils concernent des procédures en lien avec une affaire pénale en cours, mettant en cause, notamment, une société par l’intermédiaire de laquelle de nombreux particuliers ont été conduits à contracter des emprunts immobiliers, dans l’espoir, vite déçu, de voir leurs crédits compensés par des avantages fiscaux et des revenus locatifs.
C’est sous l’angle de la régularité des actes de prêt établis par des notaires que la deuxième chambre civile a eu à connaître de ces contentieux.
Dans ces affaires, les actes de prêt avaient été passés, devant notaire, en l’absence des emprunteurs dont il était indiqué qu’ils avaient donné procuration pour la signature de l’acte.
La question posée au travers des pourvois était la suivante : quelle conséquence juridique doit-on tirer de ce que, contrairement aux exigences résultant des textes relatifs aux actes établis par les notaires, les actes ne comportaient pas en annexe les procurations données par les emprunteurs et ne mentionnaient pas davantage l’indication que les procurations avaient été déposées au rang des minutes du notaire ? Ces actes pouvaient-ils permettre aux banques d’engager des mesures d’exécution forcée contre les biens des emprunteurs, notamment des procédures de saisie immobilière ?
La deuxième chambre civile a répondu par la négative à cette question et a jugé que ces actes étaient affectés d’une irrégularité qui leur faisait perdre leur caractère authentique, qui seul permet d’engager des poursuites sans disposer d’une décision judiciaire condamnant le débiteur à rembourser les sommes en cause.
En l’état de ces arrêts, les mesures conservatoires ou de saisie immobilière engagées par les établissements de crédit sont nulles et de nouvelles saisies ne pourront être effectuées que sur le fondement d’une décision judiciaire.
Extrait significatif de l’un des arrêts :
« Mais attendu qu’il résulte des motifs propres et adoptés de l’arrêt que les poursuites étaient engagées sur le fondement d’un acte de prêt notarié et au vu de l’original de la copie exécutoire établie par le notaire rédacteur de l’acte et que celle-ci, qui doit être la reproduction littérale de l’acte déposé au rang des minutes du notaire, ne portait pas mention de l’annexion des procurations de M. et Mme X… à celui-ci ;
Et attendu qu’il résulte de l’article 1318 du code civil que l’acte notarié qui ne satisfait pas aux prescriptions de l’article 8, devenu 21, du décret du 26 novembre 1971, relatif aux actes établis par les notaires, perd son caractère authentique ;
Qu’ayant relevé que les procurations n’étaient pas annexées à l’acte de prêt et que celui-ci ne faisait pas mention de leur dépôt au rang des minutes du notaire, la cour d’appel, qui n’a pas dit que les procurations devaient être annexées à la copie exécutoire, en a déduit à bon droit que la banque ne justifiait pas d’un titre exécutoire fondant les poursuites exercées à l’encontre de M. et Mme X… ; »
– Arrêt n° 966 du 7 juin 2012 (11-15.439 ; 11-18.085) – Cour de cassation- Deuxième chambre civile
– Arrêt n° 968 du 7 juin 2012 (11-16.107) – Cour de cassation – Deuxième chambre civile
– Arrêt n° 969 du 7 juin 2012 (11-15.112) – Cour de cassation – Deuxième chambre civile
– Arrêt n° 970 du 7 juin 2012 (11-15.440) – Cour de cassation – Deuxième chambre civile
– Arrêt n° 971 du 7 juin 2012 (11-17.759 ; 11-19.022) – Cour de cassation – Deuxième chambre civile