L’agent immobilier engage sa responsabilité délictuelle dès lors que par sa faute, l’acquéreur n’a pas pu obtenir la restitution du prix de vente.
Pour mémoire, selon l’article 1382, devenu 1240, du code civil, si l’impossibilité de restitution du prix par suite de l’annulation du contrat de vente ne constitue pas en elle-même un préjudice indemnisable, l’agent immobilier dont la faute a concouru, au moins pour partie, à l’anéantissement de l’acte peut être condamné à en garantir le paiement en cas d’insolvabilité démontrée du vendeur.
En l’espèce, le 17 octobre 2009, Mme [W] (l’acquéreur) a conclu avec le vendeur un contrat de réservation en vue de l’acquisition d’une « habitation légère de loisirs » au sein d’un ensemble immobilier.
Le contrat prévoyait un engagement de location du bien à usage de résidence de tourisme par l’acheteuse au profit d’une société exploitante, selon un projet de bail commercial joint en annexe.
Il a été conclu par l’intermédiaire de la société Winner-Winner, agent immobilier mandaté par le vendeur (l’agent immobilier).
L’acquisition a été financée au moyen d’un crédit souscrit par l’acquéreur auprès de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes (le prêteur), suivant offre acceptée le 12 décembre 2009.
Le 21 décembre 2009, M. [I], notaire associé au sein de la SCP de notaires [C] [I] – François Chayla, devenue Edouard Montagut et Romain Moles (la SCP notariale), a reçu l’acte de vente de cet immeuble.
La société locataire a cessé de payer les loyers et a fait l’objet d’un redressement judiciaire. Le 4 mars 2013, son administrateur judiciaire a informé l’acquéreur de son intention de ne pas poursuivre le bail conclu avec elle.
L’acquéreur a assigné le vendeur, l’agent immobilier et son assureur, la société Allianz Iard, le prêteur, la SCP notariale et son assureur, la société MMA IARD, en nullité de la vente pour vices du consentement et, consécutivement, du prêt immobilier, ainsi qu’en responsabilité et indemnisation de ses préjudices.
La Cour d’appel a rejeté la demande de l’acquéreur formée contre l’ agent immobilier et tendant à la réparation du préjudice lié à l’impossibilité d’obtenir la restitution du prix de vente du fait de l’insolvabilité du vendeur.
La cour d’appel a considéré que la perte du bien immobilier découle du seul choix procédural de l’acquéreur de maintenir sa demande de nullité de la vente nonobstant l’état de liquidation judiciaire de son vendeur et est étrangère à la faute imputable à l’ agent immobilier.
La Cour de Cassation censure cette décision.
En effet, si la cour d’appel a constaté que l’ agent immobilier avait commis une faute sans laquelle l’acquéreur ne se serait pas engagé et que le vendeur était placé en liquidation judiciaire, alors l’agent immobilier engage sa responsabilité délictuelle.
Cour de cassation, 1re chambre civile, 28 Juin 2023 n° 21-21.181