Les locataires sont responsables des nuisances et des actes de malveillance commis par leurs enfants qu’ils hébergent, quand bien même ceux-ci échapperaient de façon totale et définitive à leur autorité.
Le locataire doit se conformer à son obligation de jouissance paisible des lieux loués (art. 1728, 1°, Code Civil ; article 7 b) Loi du 6 juillet 1989). Cette obligation s’envisage d’un point de vue géographique mais également en considération du fauteur de trouble ou de la personne qui en est la victime.
Sur le plan géographique, deux récentes décisions laissent à penser que l’origine des troubles doit se situer dans les lieux loués (et non dans le hall d’un immeuble appartenant au même ensemble immobilier, mais distant de plus d’un kilomètre ou même à proximité immédiate de l’immeuble loué : Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 14 octobre 2009 n°08-12744 et n° 08-16955).
Quant aux victimes des nuisances, doivent être pris en compte – bien entendu – le bailleur lui-même (Soc. 9 juin 1966, Bull. civ. IV, n° 574), mais aussi les autres locataires (Pau, 19 oct. 1998, Cah. jurispr. Aquitaine 1999-I, p. 105 ; Colmar 27 sept. 2006, JCP 2007. IV. 1695 ; TI Saint-Étienne, 28 nov. 2000, Gaz. Pal. 2001. 2. Somm., obs. M. ; Ann. loyers 2009. 149, obs. Bérenger), voire le gardien de l’immeuble (Paris 7 nov. 1996, Loyers et copr. 1997, n° 7 ; contra, toutefois, refusant de prononcer la résiliation du bail, au motif que les injures ont été proférées à l’encontre du mandataire du bailleur, et non à l’encontre de celui-ci : Civ. 3e, 17 sept. 2008, Rev. loyers 2008. 499, obs. Rémy).
En ce qui concerne l’auteur des nuisances, enfin, la responsabilité du locataire ne saurait s’arrêter à ses propres agissements.
Aux termes de l’article 1735 du code civil, celui-ci doit en effet répondre des « dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison ou de ses sous-locataires« .
C’est ainsi qu’il a été jugé que le preneur était responsable des actes de violence exercés à l’encontre du bailleur par le concubin de la locataire (Paris, 28 juin 2005, AJDI 2006. 28, obs. Zalewski), mais aussi des agissements d’un salarié du preneur (Bordeaux, 10 avr. 1995, Rev. huiss. 1995. 1118), des dégradations imputables au plombier convoqué par ses soins (Civ. 3e, 19 janv. 2000, Bull. civ. III, n° 8) ou, comme dans le présent arrêt du 10 novembre 2009, du comportement de ses enfants (Paris, 4 sept. 2003, BICC 2004, n° 798).
En l’occurrence, le bailleur a demandé la résiliation judiciaire du contrat de location à raison des nuisances et actes de malveillance dont se sont rendus coupables les deux fils aînés des locataires, l’un étant un grand adolescent, et l’autre un adulte.
Ils ont pourtant été déboutés en appel (Paris, 20 nov. 2008), au motif que les locataires ne sauraient être considérés comme responsables du comportement de leurs enfants, connus pour leur brutalité et leur tendance à la délinquance et échappant ainsi de façon totale et définitive à l’autorité de leurs parents devenus leurs premières victimes.
Cette décision est censurée par les hauts magistrats, lesquels reprochent aux juges parisiens de ne pas avoir recherché (comme cela leur a été demandé) si les fauteurs de troubles étaient hébergés par les locataires.
Il semble effectivement difficilement contestable que, même adultes, même « incontrôlables », dès lors qu’ils sont hébergés chez eux, les enfants des locataires entrent bien dans les prévisions de l’article 1735.
Avertissement est fait au délinquant résidant chez leurs parents. Ces derniers peuvent être expulsés
Cour de Cassation, 3ème Chambre Civile, 10 novembre 2009 n° 09-11027