Le fait pour un notaire de ne pas informer ses clients de son doute sur la portée d’un engagement résultant d’une lettre ou d’une promesse de vente engage sa responsabilité professionnelle.
Après signature, le 17 mai 2003, d’un accord portant sur la vente à l’ADE, au prix de 900.000 EUR, d’un bien immobilier leur appartenant, les consorts X ont refusé de signer, le 4 juin 2003, chez leur notaire, la SCP Philippe et Francine Y (la SCP), une promesse de vente sous la condition suspensive de l’obtention d’un crédit, alors exigée par l’acquéreur ; par lettre du 10 juin 2003, la SCP a informé le notaire de l’acquéreur que les consorts X abandonnaient « toute négociation » avec l’ADE ; par une décision désormais irrévocable les consorts X, vendeurs, ont été condamnés à indemniser le préjudice subi par l’association ADE.
Les consorts X ont reproché à l’arrêt attaqué de les avoir déboutés de leur action en responsabilité contre la SCP Y, notaire, aux motifs que la faute reprochée à la SCP s’inscrivant dans le cadre de la rédaction de l’acte authentique contenant promesse de vente par les consorts X à l’ADE dont elle était chargée, et non dans celui d’un contrat de mandat que lui auraient confié les consorts X, sa responsabilité doit être recherchée sur le fondement de l’article 1382 du Code Civil ; qu’en tout état de cause le notaire est tenu, dans l’exercice de sa fonction, d’une obligation impérative de conseil à l’égard de tous ses clients, quel que soit son rôle et la nature de son intervention ; qu’il est constant qu’ interrogée par les consorts X, qui ne souhaitaient plus vendre à l’ADE, la SCP notaire leur a indiqué que le document signé le 17 mai 2003 ne constituait qu’un accord de principe qui ne les obligeait pas à réaliser la vente après, selon ses dires, avoir sollicité un avis verbal du CRIDON.
Et que le notaire est tenu d’une obligation de conseil à l’égard de ses clients qui lui impose de leur faire part des incertitudes juridiques qui peuvent exister, peu important qu’il ait lui-même consulté un tiers ; qu’en estimant que la SCP avait pu, sans commettre de faute, dire à ses clients qu’un acte ne les engageait pas, tout en constatant que cet acte était d’une interprétation difficile, ce qui imposait au notaire de faire part de cette difficulté, la Cour d’appel a violé l’article 1382 du Code Civil.
La Cour de cassation relève que pour juger que la responsabilité du notaire, appelé en garantie, n’était pas engagée, l’arrêt de la cour d’appel attaqué retient qu’il était constant qu’interrogée par les consorts X, qui ne souhaitaient plus vendre à l’ADE, la SCP leur avait indiqué que le document signé le 17 mai 2003 ne constituait qu’un accord de principe qui ne les obligeaient pas à réaliser la vente, et qu’il ne pouvait être reproché au notaire, tenu à cet égard d’une obligation de moyens et non de résultat, d’avoir donné un conseil erroné à ses clients, lesquels, pour des raisons personnelles, avaient préféré vendre à des tiers à des conditions identiques à celles offertes par l’ADE.
En statuant ainsi, tout en relevant que si le tribunal avait jugé pour sa part que le document en litige manifestait l’accord des parties sur la chose et sur le prix, il n’en demeurait pas moins que la portée du document était sujette à interprétation et n’avait rien d’évident, la cour d’appel, faute d’impartir au notaire, au titre de son devoir de conseil, l’obligation d’informer les consorts X de cette difficulté, n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l’article 1382 du Code civil.
Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 9 juillet 2009 n° 08-17579