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Publié le 31 Mai 2008

Vente à la découpe et nullité de l’offre de vente

Le manquement à l’obligation d’information mise à la charge du bailleur aux termes des dispositions d’ordre public de l’accord collectif du 9 juin 1998, rendu obligatoire par le décret du 22 juillet 1999, entraîne la nullité de l’offre de vente.

L’article 41 ter de la loi du 23 décembre 1986 prévoit la possibilité pour des organisations de bailleurs et de locataires de conclure des accords collectifs de location, susceptibles ensuite d’être rendus obligatoires par décret à tous les logements du secteur locatif concerné.

L’accord collectif du 9 juin 1998, signé en application de ce texte, a été étendu par décret n° 99-628 du 22 juillet 1999. Il porte sur les opérations de mise en vente par lots de plus de dix logements dans un même immeuble, connues sous le nom de ventes « à la découpe », organise une procédure d’information des locataires et des associations représentatives qui les regroupent et fixe les modalités d’élaboration, le contenu et la forme de l’information générale, relative, en particulier, à l’état de l’immeuble et aux travaux qu’il serait souhaitable d’y entreprendre à court et moyen terme, complétée par une information individuelle à destination des locataires leur indiquant, notamment, leurs droits personnels. Il prévoit qu’à l’issue d’un délai de trois mois à compter de cette information donnée par écrit aux locataires, le bailleur envoie à ceux-ci l’offre de vente prévue à l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975, avant de leur adresser un congé pour vendre conforme aux dispositions de l’article 15-II de la loi du 6 juillet 1989.

Dans deux arrêts précédents, la troisième chambre civile a eu l’occasion de préciser le champ d’application de cet accord collectif. Elle a ainsi jugé qu’il était applicable dès lors que le bailleur avait l’intention de mettre en vente par lots l’intégralité de l’immeuble comportant plus de dix logements, peu important que soient délivrés ou non plus de dix congés (3e Civ., 5 mai 2004, Bull. 2004, III, n° 88), et qu’il l’était également dans l’hypothèse où le bailleur avait l’intention de donner congé pour mettre en vente par lots plus de dix logements dépendant d’un même immeuble, peu important que cet immeuble, placé sous le régime de la copropriété depuis sa construction, ne lui appartienne pas dans sa totalité (3e Civ., 9 janvier 2008, pourvoi n° 06-18.856, Bull. 2008, III, n° 2).

Par ce même arrêt du 9 janvier 2008, la troisième chambre civile a retenu que le défaut de respect des dispositions de l’accord collectif entraînait la nullité des congés pour vendre délivrés. Demeurait la question controversée de savoir si la méconnaissance des exigences de l’accord, en particulier celles concernant la procédure d’information et le contenu de cette information, entraînait également la nullité des offres de vente, par ailleurs conformes aux dispositions de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1975.

Dans l’arrêt commenté, la troisième chambre civile a répondu par l’affirmative à cette question.

Elle a ainsi reconnu le caractère d’ordre public des dispositions d’un accord collectif rendu obligatoire par décret aux bailleurs du troisième secteur locatif. Ceux-ci ne peuvent donc que s’y soumettre entièrement s’ils veulent mener à bien leur opération de vente « à la découpe ».

Elle a parallèlement réaffirmé la distinction à faire entre les opérations visées à cet accord collectif, qui impliquent la mise en vente de locaux d’habitation libérés de leurs occupants, et celles, objet de la loi du 31 décembre 1975, qui portent sur la mise en vente de logements occupés, tenant pour indifférent le fait que les offres de vente adressées aux locataires revêtent la même forme et aient le même contenu.

Elle a également exclu qu’un bailleur qui s’est affranchi des contraintes de la procédure d’information impérative puisse être réputé avoir, néanmoins, valablement purgé le droit de préemption des locataires prévu par l’accord collectif, s’ouvrant ainsi la possibilité de vendre leur logement, occupé, à un tiers.

Elle a enfin consacré l’identité de la protection due aux locataires dont les logements sont concernés par l’opération, en prenant en compte le fait que la procédure d’information mise en place s’adressait non seulement aux futurs acquéreurs, mais aussi à ceux qui s’abstiendraient d’accepter l’offre de vente, qu’elle tendait à favoriser de la part de tous un choix pleinement éclairé sur l’état de l’immeuble et les conséquences financières à prévoir et que méritaient le même intérêt tous les locataires tenus dans l’ignorance, qu’ils aient choisi d’exercer leur droit de préemption ou aient préféré n’en rien faire.

Cour de Cassation 3ème Chambre Civile, 20 février 2008 n°0621122

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