L’acquéreur qui au terme d’un jugement, prononçant la vente judiciaire du bien, disposait d’un délai de deux mois pour payer le prix, ne l’a pas fait malgré une sommation faite 15 mois plus tard, et a tenté de payer le prix seulement 23 mois après la date initialement prévue voit la vente résolu à ses torts exclusifs. L’acquéreur perd le bénéfice de la vente judiciaire et doit indemniser le vendeur en raison de son comportement dilatoire et exclusif de toute bonne foi visant à bloquer la libre disposition du bien immobilier pendant quatre années au détriment de la venderesse.
En l’espèce, aux termes du jugement susvisé rendu le 9 avril 2009, la venderesse devait comparaître en l’étude de Me A, notaire, dans le délai de deux mois suivant la signification du jugement aux fins de signer l’acte authentique de vente.
À défaut de signature de l’acte dans ce délai par la venderesse, le tribunal a décidé que son jugement vaudrait acte authentique de vente du bien dans les termes de l’acte notarié dressé par Me A.
Ce jugement a été signifié en date des 19 et 27 mai 2009 étant ainsi devenu définitif.
L’acquéreur ne justifie, ni même n’allègue, avoir effectué pendant près de neuf mois suivant la date à laquelle le jugement susvisé est devenu définitif quelques diligences positives que ce soit, pour concrétiser l’acte de réitération par acte authentique de vente devant son notaire ou celui du vendeur.
En revanche une sommation lui a été délivrée le 26 octobre 2010 à l’initiative du vendeur aux fins de régularisation de l’acte authentique, demeurée totalement infructueuse, qui a conduit Me B., notaire, à dresser un acte de défaut le 29 octobre 2010.
Il est établi que ce n’est qu’après avoir réceptionné le courrier de la venderesse du 25 mars 2011 se déclarant déliée de tout engagement, que l’acquéreur a, en réponse, fait délivrer une sommation de régulariser un acte de vente le 3 mai 2011, en l’office de Me A, hors de tout délai raisonnable et sans qu’un projet d’acte ait été soumis préalablement au notaire de la venderesse.
Il ressort des dispositions de l’article 1654 du code civil que « si l’acheteur ne paie pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente ».
En ne remettant pas le prix de vente le 29 octobre 2010, alors même qu’elle était sommée à comparaître à cette même date pour signer devant notaire l’acte de transfert de propriété intervenu aux termes du jugement rendu le 9 avril 2009, et alors même que le délai de deux mois, durant lequel la venderesse devait comparaître en l’étude de Me A, notaire, aux fins de signer l’acte authentique de vente, prévu par le jugement susvisé était expiré depuis longtemps, l’acquéreur doit être regardé comme n’ayant pas payé le prix de vente au sens des dispositions susvisées dans les conditions posées par le jugement du 9 avril 2009, manquant ainsi gravement à une de ses obligations et justifiant que soit prononcée la résolution de la vente litigieuse pour défaut de paiement du prix, peu important qu’il ait proposé postérieurement de s’acquitter du paiement du prix de vente.
Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la résolution judiciaire de la vente intervenue, telle que constatée aux termes du jugement du 9 avril 2009, de constater le caractère définitif de cette résolution et de faire injonction tant à l’acquéreur qu’à Me A de ne pas publier le jugement du 9 avril 2009 à la conservation des hypothèques.
Sur les demandes de dommages-intérêts :
La venderesse rappelle être une SA de HLM ayant pour objet l’acquisition, la construction, la vente ou la location d’habitations à loyer modéré ; que la défaillance de la défenderesse a entraîné un blocage de la situation de manière unilatérale et à son seul bénéfice, entraînant une absence totale de libre disposition du prix de vente à compter de son exigibilité ; qu’elle n’a pas été en mesure de consacrer les fonds à son objet social entravant en conséquence son action.
Elle sollicite une somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts. Elle réclame ensuite une somme de 790 000 € au titre du préjudice subi en raison de l’immobilisation du bien du fait de la déloyauté de l’acquéreur, correspondant à la perte de chance d’avoir pu disposer de son bien.
Le comportement dilatoire et exclusif de toute bonne foi de l’acquéreur visant à bloquer la libre disposition du bien immobilier pendant quatre années au détriment de la venderesse, bailleur social, est établi.
La demanderesse a de ce fait subi un préjudice qui sera justement réparé par l’allocation d’une somme de 30 000 € de dommages-intérêts. En revanche, l’intimée ne justifie d’aucune perte de chance sur la valeur du bien, lequel pourra être revendu au prix actuel du marché immobilier. Elle sera déboutée de cette demande.
Cour d’appel de Paris, Pole 4, Chambre 1, 30 octobre 2014, n°13/10606