Lorsqu’une vente a lieu au même prix net pour le vendeur mais avec une commission inférieure, le premier agent immobilier a droit à la réparation du préjudice subit.
Même s’il n’est pas débiteur de la commission, l’acquéreur dont le comportement fautif a fait perdre celle-ci à l’agence immobilière titulaire d’un mandat du vendeur par l’entremise de laquelle il a été mis en rapport, doit à l’agent immobilier sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l’article 1382 du Code Civil réparation de son préjudice.
Aux termes de la loi Hoguet du 2 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972 l’agent immobilier n’a droit à une rémunération que si l’affaire pour laquelle il avait reçu un mandat écrit a été menée à bonne fin, effectivement conclue et constatée par un acte écrit, conditions non réunies en l’espèce puisqu’aucun compromis de vente n’a été passé entre les époux D et les consorts O-B par l’intermédiaire de la Sarl Pastel Immobilier.
Toutefois, même s’il n’est pas débiteur de la commission, l’acquéreur dont le comportement fautif a fait perdre celle-ci à l’agence immobilière titulaire d’un mandat du vendeur par l’entremise de laquelle il a été mis en rapport, doit à l’agent immobilier sur le fondement de la responsabilité délictuelle réparation de son préjudice.
Suivant bon de visite du 13 novembre 2007 cet agent immobilier a fait visiter le bien à M. Fabrice Ourcet et Mme Christelle Burgan qui ont présenté une offre écrite d’achat pour le prix global de 260.000 euro soit 245.000 euro net assortie d’un délai de validité de 3 jours qui a été refusée par les vendeurs en raison de l’insuffisance de prix.
Le bon de visite signé à cette occasion attirait leur attention sur le risque d’engager leur responsabilité vis à vis de l’agence immobilière s’ils traitaient son acquisition en dehors de son intervention soit directement soit avec un autre intermédiaire.
Ils ont 5 jours plus tard soit le 24 novembre 2007 présenté par l’intermédiaire d’un autre agent immobilier, la Sarl Topaze Immobilier, une offre pour la somme de 240.000 euro ne comprenant pas les honoraires de négociation à leur charge.
Mais suivant compromis de vente du 30 novembre 2007 et acte authentique du 20 février 2008 ils ont acquis l’immeuble par l’intermédiaire de la Sarl Topaze Immobilier exerçant sous l’enseigne Century 21 au prix de 245.000 euro outre une commission de 10.000 euro.
Les acquéreurs et les vendeurs n’ont à aucun moment avisé la Sarl Pastel Immobilier de cette opération.
Ils ne pouvaient ignorer qu’en procédant ainsi ils la privaient de son droit à rémunération.
D’après la Cour d’appel, leur attitude revêt un caractère fautif qui les oblige à en réparer les conséquences dommageables.
Le préjudice subi par la Sarl Pastel Immobilier a été à juste titre fixé à la somme de 10.000 euro par le premier juge, dans la mesure où la réalisation de la vente n’aurait pas été possible au-delà d’un tel montant, eu égard aux exigences des vendeurs et des facultés des acquéreurs qui avaient la charge de la rémunération de l’intermédiaire, la seconde offre ayant fait l’objet de négociations avec un prix final supérieur à l’offre et une commission inférieure à celle figurant au mandat.
Cet arrêt semble aller à l’encontre de la jurisprudence de la Cour de cassation (Cour de Cassation, 1ère Chambre Civile, 25 novembre 2010 n° 08-12432).
En effet, La Cour de cassation avait énoncé, au visa de l’article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, que lorsque le mandant a donné à un mandataire un mandat, il n’est tenu de payer une rémunération qu’à l’agent immobilier par l’entremise duquel l’opération a été effectivement conclue, au sens de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970, et cela même si le bien lui avait été précédemment présenté par le mandataire initial, sauf à ce dernier à prétendre à l’attribution de dommages et intérêts en prouvant une faute du mandant qui, par abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l’aurait privé de la réalisation de l’acquisition.
En l’espèce, sauf à considérer que la faute essentielle des acquéreurs a été de ne pas prévenir de la conclusion de la vente avec une autre agence ou que le prix de vente net du bien immobilier (245.000,00 euros) était le même. En toute hypothèse cette décision devrait être de nature à faire peur aux acquéreurs qui tentent par tous les moyens d’évincer l’agent immobilier qui les a mis en rapport avec le propriétaire vendeur.
C.A. Toulouse, Ch. 1, sect. 1, 11 avr. 2011 (arrêt n° 213, R.G. n° 10/00048)
Document joint : cour-dappel-toulouse-chambre-1-section-1.pdf